De Brest à Joshua Tree, où a eu lieu l'enregistrement final, des Dakotas à Montréal en passant par Paris, la maquette de Kensico a passé dans nombre de mains et plus d'oreilles encore. Tellement qu'il est difficile de dresser la liste des collaborateurs du CD White Sage, son premier, que Gaëlle Bellaunay a lancé hier à La Vitrola, sur la Main.

Durant toutes ces années, la chanteuse d'origine bretonne est restée engagée dans ce «processus de guérison» qui, de lieux en rencontres, l'a aidée à intégrer en un tout vivable les éléments épars de sa vie «chaotique». Un peu, comprend-on, grâce à la philosophie des Lakotas, ces Indiens des Plaines qu'elle a longtemps côtoyés - comme compagne, entre autres, d'un Métis d'origine sioux avec qui elle a eu un fils.

N'arbore-t-elle pas un t-shirt avec l'image de l'oiseau-tonnerre dans le livret de White Sage? Le titre même de l'album renvoie à la sauge blanche dont se servent les Amérindiens pour chasser les mauvais esprits de leurs lieux de résidence. Ou de leurs coeurs: I lost my love in the desert/And I'm cleansing my soul now...

«Je comprends cette philosophie, mais je ne peux me l'approprier et encore moins m'en servir comme stéréotype», explique celle qui, avant de partir à la découverte du monde, avait grandi avec la musique de Gong et de Magma, un groupe de jazz rock qui a fait connaître des musiciens comme Didier Lockwood et Claude Engel.

Pas surprenant qu'elle se soit ensuite inscrite au Centre d'informations musicales (CIM) de Paris, une école de jazz et de musiques actuelles, et que de là, encouragée par le bluesman Luther Allison, qu'elle avait rencontré dans un club de Paris, elle se soit engagée comme chanteuse dans des big bands de jazz.

Chanter en anglais

L'origine de l'idiome, les voyages aux États-Unis et les relations personnelles l'ont amenée à écrire et à chanter en anglais, avec un accent d'une étonnante pureté. 

«J'écris dans la langue des gens et des événements qui ont inspiré mes chansons», dit l'auteure de ces textes beaucoup plus sombres que la personne souriante que nous avons rencontrée en entrevue dans le Mile End.

La plupart des musiques sont signées Daran, son compagnon de vie, qui lui a fait découvrir le Québec quand elle est venue s'y établir avec lui, il y a quatre ans. 

«On dirait que tous les Québécois sont musiciens!» lance Kensico, du nom de cette rue où elle habitait en Californie, mais qui vient d'un ancien chef de la tribu algonquienne Siwanoy, Coken-si-co, dont le territoire ancestral, dans l'État de New York, est occupé par le réservoir et le barrage Kensico depuis la fin du XIXe siècle.

Daran, «capitaine» de la deuxième version de White Sage, a joué sur le CD et accompagne la chanteuse sur scène, avec le guitariste André Papanicolaou, le bassiste Yves Labonté et le batteur Colin Burnett.

Tout pour accélérer la «guérison» de Kensico.