Il y a eu Monsieur Mono, qui murmurait des confessions post-rupture sur deux albums minimalistes. Il y a encore par bribes Monsieur le Chien, qui revisite en concert son répertoire rock érigé au sein de Possession simple et des Chiens. Mais le chanteur que La Presse retrouve au café Lézard, rue Masson, utilise son vrai nom, Éric Goulet.

Sur Volume 2, l'auteur-compositeur-interprète-réalisateur troque encore toutes ses casquettes contre le chapeau du cowboy urbain. Entre ville et campagne, il trimballe dans son holster des chansons simples mais pas simplistes. Pourquoi flinguer ses personnages et ses pseudonymes? «Parce que le country commande la vérité», explique-t-il.

Avec la même équipe de musiciens que sur le Volume 1 - Carl Prévost et Rick Haworth aux guitares, Ariane Ouellet au violon, Marc Hébert à la basse et Vincent Carré à la batterie -, le chanteur propose une suite majoritairement composée de chansons originales, parmi lesquelles se glissent des versions country de l'iconique Comme un cave (Possession Simple) - soufflée par l'harmonica de Guy Bélanger - et de la jolie ballade fataliste La dernière chanson (Monsieur Mono).

«Les deux pièces avaient déjà un son très country, alors c'était naturel de les inclure, dit Éric Goulet. À l'époque, j'avais fait une version guitare-voix de Comme un cave, et ça ressemble beaucoup à celle qui se retrouve sur Volume 2.» Seule autre reprise: le classique Lucille, de Kenny Rodgers, popularisé au Québec par le vénérable Tex Lecor.

L'inspiration des nouvelles compositions a surgi sur la route des festivals, mais aussi dans les couloirs du sommeil. «Trois chansons me sont venues en rêvant, raconte Éric Goulet, amusé. À mon réveil, j'avais une mélodie et des paroles en tête.» C'est le cas de Sers-moi à boire, sur les affres du licenciement, de la chansonnette rythmée Le trou de ma guitare et de la bien nommée Jusqu'au bout de la nuit.

Des récits de routes, de déroutes et de banqueroutes se posent sur un folk courtement vêtu de pedal steel, de guitares et de mandoline. Pour compléter le tableau, Éric Goulet souhaitait qu'un train siffle dans ce paysage western. «J'ai passé une commande à Alexandre Belliard, avec qui j'avais travaillé sur son projet l'Usine à chanson [une confrérie d'écriture et d'entraide à L'Isle-Verte]. Deux heures plus tard, il m'a envoyé La grande évasion

En 2012, seulement 48 heures ont suffi à l'enregistrement, en prise live, de Volume 2. Parce que là aussi, «le country commande la vérité».

Contrées country



Le virage country d'Éric Goulet, en 2011, peut sembler incongru pour ceux qui l'ont suivi dans ses projets rock. Mais le musicien a grandi au son des légendes Kenny Rodgers, Johnny Cash et Willie Nelson.

«Lorsque j'allais chez mes tantes, c'est ça qui jouait, mais je n'y prêtais pas attention, parce que c'était de la musique de vieux. Inconsciemment, ce sont des influences qui sont restées.»

Il attribue à l'inéluctable trajet de musicien sa décision, vers 14 ou 15 ans, d'agacer les claviers et de se diriger vers le rock progressif. «Je voulais avant tout faire partie d'un band.»

Force est d'admettre que la carrière solo d'Éric Goulet a blanchi les cheveux de ses fans. «J'aime m'adresser à différents publics. Ce n'est pas nécessairement une bonne idée du point de vue marketing, mais ça me plaît de faire des disques ciblés. Mon but n'est jamais de plaire à tout le monde.» D'ailleurs, il n'écarte pas l'idée de refaire japper Les Chiens sur un nouvel opus.

Cowboy de bitume en latence depuis son adolescence, Éric Goulet a retrouvé son nom et ses origines. Mais qu'est-ce qu'un album de genre peut apporter en 2014? «Ma modeste contribution, je crois, c'est d'ajouter de nouvelles chansons au répertoire. Avec mon expérience sur d'autres projets, j'apporte peut-être aussi une petite twist de plus, différente.»

Selon lui, le country est loin d'être «le choix de la facilité», comme certains le suggèrent. «Les festivals ont de petits budgets, et ils les utilisent pour faire venir de grands noms ou de petits bands locaux. Moi, je suis reconnu dans mon milieu, mais pas connu en dehors, alors c'est difficile.»

Son gagne-pain reste d'abord la réalisation. Il planche justement sur le prochain album de Pierre Flynn, avant de reprendre la route des festivals pour présenter avec ses musiciens Volume 2.

En chantant seul et sous son propre nom, Éric Goulet repart à zéro, en quelque sorte. «Même si ça fait des décennies que je suis dans le métier», dit-il. Tout ça, pour l'amour du country. Et de la vérité qui le commande.

À La Vitrola le 24 mai.

Éric Goulet

Volume 2

L-A be

Sortie mardi prochain