Devenu sans en avoir l'air un des plus grands groupes de rock du monde, The Black Keys se voient toujours comme des «ouvriers» et reviennent lundi avec un huitième album, l'introspectif Turn Blue.

Formés en 2002 par Dan Auerbach et Pat Carney, The Black Keys sont longtemps restés dans l'ombre des White Stripes, autre duo guitare-batterie ancré dans le coeur de l'Amérique.

Mais Brothers, puis El Camino (2011) et leur succès intemporels (Tighten Up, Lonely Boy...) ont changé la donne.

Acclamé par la critique, le duo d'Akron (Ohio) a engrangé sept Grammys, a été tête d'affiche des plus grands festivals et écoulé plusieurs millions de disques à travers le monde.

Dan Auerbach, le chanteur et guitariste du groupe, est devenu un producteur recherché, aussi bien par la légende du blues Dr John que par Lana del Rey.

Mais le succès a coûté cher au duo. Après Pat Carney en 2009, Dan Auerbach a vécu un difficile divorce en 2013.

Cette période troublée a largement influencé Turn Blue, disque introspectif, dont les textes reviennent sans cesse sur le thème de la rupture, à l'image de la chanson-titre où Dan Auerbach chante dans un falsetto: «Je ne crois pas que tu comprennes que ça pourrait être l'enfer».

«J'étais au milieu du divorce quand j'écrivais, c'était impossible pour moi de penser à autre chose. Je n'aurais pas pu inventer d'histoires», dit-il à l'AFP.

«Pour la première fois de ma vie, j'ai vraiment utilisé la musique comme une thérapie. La musique m'a toujours fait me sentir bien, m'a toujours excité. Mais cette fois, elle m'a fait tenir debout», confie-t-il.

Pour le batteur Pat Carney, Turn Blue est ainsi une sorte de «miroir» de Brothers.

«À l'époque, c'est moi qui divorçais et faire de la musique avec Dan était très thérapeutique pour moi. Les deux disques viennent d'endroits similaires, alors qu'El Camino était une anomalie, née du fait que nous devions jouer dans des salles de concerts plus grandes et avoir des chansons plus rapides», explique-t-il.

«On ne changera jamais»

«Brothers et Turn Blue reflètent nos tendances musicales naturelles, ce rythme mid-tempo, soul. Avec El Camino, nous voulions faire un disque rock très simple, très linéaire, mais ce n'est pas la façon dont nous écoutons de la musique», ajoute Dan Auerbach.

«J'aime les albums qu'on écoute au casque, tout du long, où chaque chanson est un petit voyage. J'ai l'impression qu'on a réussi à faire ça pour la première fois sur Brothers et que Turn Blue en est la suite», ajoute-t-il.

Weight of Love, la chanson qui ouvre l'album, sonne comme une note d'intention. S'étirant sur sept minutes, s'ouvrant sur un long passage instrumental et un solo de guitare, c'est une première dans la discographie d'un groupe encore associé au garage et au blues.

«Dès qu'on l'a enregistrée, on a immédiatement décidé avec Brian (Burton, producteur attitré et «troisième» membre du groupe) qu'elle ferait l'ouverture. On aime le fait qu'elle exige que vous écoutiez en permanence, que vous vous impliquiez», dit Dan Auerbach. Même si les tournées intensives leur ont coûté leurs mariages, The Black Keys ne comptent pas ralentir le rythme pour autant.

«C'est en nous. On a toujours eu cette éthique de travail, cette mentalité d'ouvriers. On a vu nos parents être fauchés toutes leurs vies, travailler trop et en avoir très peu de retour. Je crois qu'on ne changera jamais», estime Dan Auerbach.