Toujours aussi absurde, mais plus mélodieux, le chanteur français Philippe Katerine publie Magnum, un douzième album porté par son credo: «Surtout ne soyez pas vous-même», dit-il à l'AFP.

Dès la pochette, le décor - kitsch - est planté: Katerine pose en robe de chambre en satin, saxophone en main, devant une plage paradisiaque baignée d'un coucher de soleil orangé.

SebastiAn, un des fers de lance de l'électro française qui a produit et co-composé le disque, a imaginé pour Katerine la bande-son d'une soirée d'après-plage, entre disco italienne et pop lascive.

«Je voulais changer complètement de son. Sur les derniers disques, je souffrais un peu de ne pas chanter des mélodies, ce que j'adore. Là, j'ai pris plaisir à chanter de façon un petit peu sentimentale», raconte le chanteur.

À ses débuts dans les années 90, Philippe Katerine avait exploré une veine musicale très délicate, inspirée de la bossa, comme sur le délicieux Mon coeur balance ou le mélancolique Copenhague.

Puis, le chanteur s'est tourné vers un univers de plus en plus décalé, culminant avec les succès Louxor, j'adore et 100% VIP.

En 2010, son dernier disque, Philippe Katerine, poussait au bout cette logique en faisant cohabiter collages sonores, références scatologiques et humour absurde.

«Je crois que j'étais embarqué dans des concepts qu'il m'intéressait d'explorer». Mais «à un moment donné j'ai eu l'impression d'être dans une impasse», confie-t-il.

Avec Magnum, Philippe Katerine voulait faire un disque «confortable», avec «une tendresse» qui reflète sa situation personnelle.

Le chanteur est en couple avec l'actrice Julie Depardieu, avec qui il a eu deux enfants.

Danse avec des poussins géants

«C'est un moment de bonheur dans ma vie. C'est complètement con à avouer, mais c'est vrai qu'à un moment donné, on se dit «je n'aimerais pas être à la place de quelqu'un d'autre»», confie-t-il.

Si l'ensemble baigne dans la «douceur», l'album et plus encore le film qui l'accompagne sont cependant fidèles à l'univers délirant du chanteur.

Philippe Katerine mange des crèmes glacées et boit des magnums de champagne nu sur sur la plage, danse avec des poussins géants, chante ses «grosses couilles» ou son sentiment d'être «une frite dans un cornet de frites».

«Surtout ne soyez pas vous-même», conseille-t-il à l'auditeur.

«Ne pas être soi-même, c'est le point de départ du romanesque et c'est ce que j'aime: faire de sa propre vie une fiction, en tout cas dans les disques», explique-t-il.

«Les gens me prennent pour un fou, mais on est tous fous quelque part. La chanson, c'est un bon endroit pour exprimer sa folie, alors que dans la rue ou dans la vie, c'est très difficile», ajoute le chanteur, «surpris» que certains se sentent «agressés» par sa musique ou le voient comme un provocateur.

«Ce n'est ni mon goût, ni ma personnalité», affirme-t-il de sa voix douce et posée.

D'ailleurs, les textes absurdes de ses chansons naissent souvent de conversations de la vie courante attrapées au vol dans les bistros, façon Brève de comptoir.

«Sur Magnum une chanson comme Les dictateurs est née comme ça: j'ai entendu un gars dans un bar qui disait «J'ai vu une photo d'Hitler quand il était petit, c'était un superbe bébé»», explique-t-il.

Décidément les pieds sur terre, Philippe Katerine a choisi de ne pas faire de tournée pour défendre ce nouvel album, histoire de ne pas s'éloigner de ses jeunes enfants.

«Je ne me sens pas de partir. Être dans un bus de tournée, en ce moment, ce n'est pas ma place», dit-il.