Voyager avec son piano, cela ne se voit pas tous les jours. C'est pourtant ce que fait Marc Vella depuis 25 ans. Cet infatigable pianiste, compositeur, écrivain et conférencier a visité 40 pays avec son instrument pour porter son message musical et humaniste.

Marc Vella, actuellement en tournée au Québec, ne voyage jamais seul. Il se déplace avec son piano, bien sûr, mais aussi en compagnie d'une quarantaine de compagnons, la «Caravane amoureuse». Ce projet soutenu par l'UNESCO vise à mettre de l'avant le patrimoine humain.

La Caravane, qui suit le pianiste depuis neuf ans, a déjà «envahi amoureusement» la Syrie, le Liban et le Kosovo, entre autres. Au moment de rencontrer La Presse, elle arrivait tout juste de l'Abitibi, où Marc Vella et ses amis ont joué pour et avec les communautés autochtones. Une équipe de cinéma, qui les suit, tourne un documentaire sur le patrimoine humain du Québec.

Le droit à l'erreur

L'odyssée de Marc Vella avec son piano a commencé alors qu'il avait 24 ans. Après avoir étudié la composition et remporté quelques prix, il quitte les sentiers de la carrière conventionnelle pour la vie de pianiste nomade.

«Je n'avais pas d'argent, dit-il. J'étais un mendiant avec un piano à queue qui régnait sur un bout de trottoir. Les gens étaient touchés et me donnaient de quoi poursuivre le voyage.»

Son séjour chez nous est aussi le prétexte pour présenter son nouveau livre, Éloge de la fausse note, disponible depuis lundi. L'ouvrage, tenant à la fois de l'essai philosophique et du livre de croissance personnelle, porte son message: l'être humain a droit à l'erreur. Dans cette perspective, l'apprentissage du piano est la plus belle métaphore qui soit.

«Quand les gens me parlent du piano, ils me disent: on m'a tellement tapé sur les doigts parce que je faisais des fausses notes! Ça fait des millénaires que l'on vit dans cette dynamique de condamnation et de punition. Ça ne marche pas! La fausse note est inévitable, on en fait tous. Face à la maladresse et à la fausse note, la seule attitude possible est celle de la compassion et de l'accompagnement bienveillant», dit-il.

Son objectif en écrivant ce livre était de réconcilier les gens avec eux-mêmes. «Il y a une très grande violence en ce monde envers celui qui sort du cadre, dit-il. Si tu ne cadres pas sur le plan physique ou social, tu es rapidement jugé, exclu. Je crois pourtant que chacun peut aspirer à la grâce.»

Dans ses concerts, il met en pratique cette acceptation de soi en faisant monter sur scène des spectateurs n'ayant pas la moindre notion musicale, pour jouer avec lui à quatre mains. Avec des résultats parfois étonnants et même bouleversants!

«J'entends souvent des gens me dire qu'ils ont toujours rêvé de jouer du piano, mais on leur a dit qu'ils n'étaient pas doués, que ce n'était pas pour eux, raconte-t-il. Ou alors, une personne a fait de la musique, mais on l'a tellement démolie qu'elle n'ose plus jouer! Combien de gens y a-t-il, comme ça, pour qui la musique s'est arrêtée? C'est terrible, ce sont des vies volées. Je dis aux gens: tu vas faire des fausses notes, mais je vais t'accompagner.»

Éloge de la fausse note, Marc Vella, Éditions Le jour