Pour ses 10 ans, Dare to Care Records et sa soeur Grosse Boîte donnent quatre spectacles, d'ici à dimanche, réunissant les artistes des deux étiquettes de disques. En attendant, les grands bilans avec le patron, Éli Bissonnette.

À sa première année de cégep, il voulait tellement jouer de la trompette dans un groupe de punk-rock-ska («car il y a moins de pitons que sur un sax») qu'il a dit à un voisin de classe musicien qu'il voulait se joindre à son groupe. Or, Éli Bissonnette ne maîtrisait pas très bien l'instrument. Pas grave: trois mois plus tard, il était sur scène pour le tout premier spectacle de Naked N' Happy.

Si le bassiste Christian Létourneau n'avait pas été derrière lui dans un cours du cégep André-Laurendeau, dans la deuxième moitié des années 90, est-ce qu'Éli Bissonnette serait le patron de Dare To Care Records et de sa petite soeur Grosse Boîte, qui fête son 10e anniversaire? «Si je ne faisais pas ça, je ne sais pas ce que je ferais», répond le principal intéressé.

Mais à l'époque? «Je voulais être prof d'histoire», se rappelle-t-il.

En fin de compte, Naked N' Happy n'a sorti que deux albums, dont un disque live-testament, qui a marqué la fin du groupe, mais a mené à la naissance de Dare to Care Records, qu'Éli Bissonnette a fondée avec Hugo Mudie des Sainte Catherines. «Hugo et moi avions comme projet de lancer un label. C'était l'excuse parfaite», raconte-t-il.

La deuxième sortie de DTC a été une compilation acoustique intitulée Early Summer Campfire Songs, puis l'album réunissant The Couch Addiction et Yesterday's Ring. «C'était assez prolifique pour une année tout croche. Je pense que je n'avais pas d'ordi», se remémore Bissonnette.

Ensuite, les Planet Smashers, We Are Wolves, Georges Leningrad et un jeune groupe méconnu nommé Malajube se sont joints à la famille de DTC, alors qu'Hugo Mudie a quitté le navire. Puis en 2006, Éli Bissonnette a fondé Grosse Boîte, qui allait être la soeur francophone de Dare to Care.

Après la sortie de Mexico de Jean Leloup en format vinyle, Grosse Boîte a lancé les premiers albums de Tricot Machine, Coeur de pirate, Le Husky, Bernard Adamus, Jimmy Hunt, etc. Comme en témoignent les nombreux trophées Félix qui font le garde-à-vous dans les bureaux de DTC/Grosse Boîte, les étiquettes de disques jumelles sont une niche de nouveaux talents.

«Je nous vois encore comme un label punk, dans la façon de faire, l'éthique. Il y a un aspect fait maison, bricolage, c'est encore là», indique Éli Bissonnette, qui peut compter aujourd'hui sur 11 employés, dont une directrice générale, Laurie Boisvert, qui lui permet de «confronter ses idées». «Tous les jobs qu'il y a dans un label, je les ai faits. J'ai imprimé des t-shirts! raconte-t-il. Je m'implique encore dans toutes les tâches, mais c'est dans la direction artistique que je suis le meilleur.»

Son souhait? «J'aimerais avoir un petit bureau fermé», répond-il en riant.

Éli Bissonnette reçoit plus d'un démo par jour. Dans le cas de Coeur de pirate, elle avait plutôt remis son CV pour se dénicher un emploi, mais le patron de Grosse Boîte a bien aimé ce qu'il a entendu sur sa page MySpace. Le premier démo de Malajube ne l'a pas convaincu, mais une performance dans un party, oui. «J'y vais beaucoup avec l'instinct, explique-t-il. Je demande aussi l'avis des collègues, et il y a la rencontre avec l'artiste.»

Et la bosse des affaires? «Oui, il faut bien gérer un budget, mais le plus important, ce sont les artistes», dit Bissonnette.

Dare to Care a vu le jour à l'époque où les budgets de promo de 200 000$ était révolue, donc il n'y a pas eu la désillusion vécue par d'autres étiquettes qui ont vécu l'âge d'or du disque. «On a commencé à faire des disques quand la crise a commencé, donc on n'a jamais vécu de décroissance.»

Des regrets? Il y a un artiste qu'Éli Bissonnette regrette de ne pas avoir signé. «Mais il y a beaucoup de gens que je n'ai pas signés et je me suis dit: j'ai bien fait!»

En spectacle

> Ce soir: Bernard Adamus, Tricot Machine et Les frères Goyette au Divan Orange

> Vendredi: We Are Wolves, Jimmy Hunt et Panache à la Sala Rossa

> Samedi: spectacle-surprise au Club Lambi

> Dimanche: Lake Of Stew, Avec pas d'casque et Le Husky en formule acoustique au Quai des brumes

> Du 1er au 5 juin à la galerie Yves Laroche, exposition des oeuvres de Béatrice Martin, Socalled, Jimmy Hunt, Les frères Goyette, We are Wolves et Fanny Bloom