Lancé l'automne dernier, Dear Science, troisième album du groupe new-yorkais TV on the Radio, a rallié les amateurs d'indie rock et les critiques, qui l'ont consacré album de l'année 2008. Le groupe se produit mercredi au Métropolis, à l'invitation du festival Suoni Per Il Popolo.

Il y a de ces artistes qui sont, dans la vie, totalement en harmonie avec leur création. Au bout du fil, le chanteur et bidouilleur brooklynois (né au Nigeria) Tunde Adebimpe est un sympathique interlocuteur, chaleureux, et plutôt humble, même si on a tendance à le considérer, lui et ses compères, comme de nouveaux petits génies.

 

En tout cas, s'il fallait encore une fois les comparer à Radiohead (le premier album de TV on the Radio s'intitule OK Calculator!), disons seulement que ces Américains ont l'air d'avoir pas mal plus de plaisir à faire ce qu'ils font que leurs collègues britanniques...

«C'est vrai que Dear Science est un album plutôt entraînant et dynamique, concède Adebimpe. Pas mal plus que Return to Cookie Mountain», le précédent album, paru en 2005, qui a révélé le talent de l'interviewé, du second chanteur et claviériste Kyp Malone, du guitariste et réalisateur Dave Sitek et de leur efficace section rythmique Jaleel Bonton (basse) et Leah Hayes (batterie).

Une bombe, ce disque, pour lequel le quintette new-yorkais a réquisitionné la section rythmique du Antibalas Afrobeat Orchestra pour faire lever la sauce. Les cuivres rutilants se frottent à de savants arrangements de guitares et de sons électroniques, on y conjure le funk classique, la pop électronique, le rock d'avant-garde de manière presque schizophrénique. Sitek, à la réalisation - il a bossé sur les disques des Yeah Yeah Yeahs, Liars, Foals et, hum, Scarlett Johansson! - confère la cohérence nécessaire pour qu'une telle galette coule de source.

«En nous assoyant ensemble dans le studio, nous avons tous convenu que nous avions envie de faire un disque plus enlevant, plus joyeux. Question de feeling, je crois. Il y a assez de choses horribles qui arrivent ces temps-ci, on sentait le besoin de se laisser aller différemment sur Dear Science, plutôt que de se plonger dans un disque dépressif. La musique peut évidemment servir à exprimer un mal-être, mais elle peut aussi servir d'antidote.

«Il faut savoir garder son sens de l'humour pendant des périodes difficiles», dit l'artiste, un cinéaste d'animation de formation, et acteur à ses heures... enfin, lorsque ses heures le lui permettent. «Ça m'arrive de souhaiter que les tournées ne soient pas aussi longues, que je puisse me consacrer à d'autres projets. Ce n'est pas simple de rallier mes trois passions... Mais il n'y a aucune frustration de ma part - j'aime ce que je fais.»

C'est réciproque. Le public, les critiques, ont trouvé en TV on the Radio un nouveau chouchou de la scène indie. «En tant que musiciens, on passe tellement de temps à réfléchir à ce qu'on crée, aux intentions et à la direction qu'on veut donner à notre travail, que c'est très curieux de lire les critiques et d'y voir des intentions que nous avions, ou pas, en composant un album. Pour cette raison, il faut vite se détacher des critiques, qu'elles soient favorables ou non. Et je pense à tous ces musiciens qui ne se font pas «découvrir» (les guillemets sont de lui) en me disant qu'il ne faut pas non plus s'arrêter à la hype ou à la manière dont on perçoit et juge notre travail.»

N'empêche, la critique aime TV on the Radio, et les promoteurs s'arrachent leurs concerts. C'est un détail qui en dit long sur l'ascendance de TV on the Radio: le groupe est aussi courtisé par un festival consacré à l'avant-garde musicale pointue (Suoni Per Il Popolo) et un autre, ouvertement pop et généraliste (le FIJM).

«Je suis ravi qu'on nous invite dans des événements variés comme ça - on a joué au Festival de jazz de Montréal. Franchement, non seulement je suis content qu'on nous invite - point -, mais à Montréal, surtout, peu importe le cadre. Une belle ville où jouer, je ne peux pas expliquer pourquoi... À Brooklyn, lorsqu'on a commencé à jouer, les gens se demandaient vraiment ce qu'on faisait, ils étaient dubitatifs. Chez vous, c'est comme si le public avait tout de suite compris.»

***

TV on the Radio, mercredi au Metropolis, dans le cadre du festival Suoni Per Il Popolo.