Al-Andalus désigne le territoire conquis en Europe médiévale par les Maures, territoire occupé de 711 à 1492. Pour évoquer cette grande époque de la civilisation arabe dans la péninsule ibérique et aussi pour jeter un éclairage contemporain sur cette culture profondément métissée, deux musiciens d'envergure internationale ont nommé leur ensemble Al-Andalus.

Formé par la guitariste Julia Banzi et l'oudiste Tarik Banzi, le groupe partage son temps entre l'Oregon et le Maroc. Formation à géométrie variable, Al-Andalus a enregistré cinq albums et se produit pour la première fois à Montréal dans le cadre du Festival du monde arabe (FMA).

 

«Tarik et moi constituons le noyau de cet ensemble. Nous sommes mariés mais il s'agit également du mariage entre la guitare et l'oud. Mais nous aimons aussi jouer avec d'autres; à Montréal, sera parmi nous le violoniste Razgui Boujemaa avec qui nous travaillons depuis longtemps. Ainsi, nous serons trois musiciens sur scène, auxquels se joindra Laura Dubroka, qui aborde la danse flamenca d'une manière très contemporaine» explique Julia Banzi, jointe aux États-Unis il y a quelques jours.

Al-Andalus est un concept né en Espagne à la fin des années 80, la guitariste raconte la trajectoire.

«Nous étions alors basés à Madrid. Dès sa fondation, Al-Andalus fut la réunion de différentes cultures qui vibraient dans la capitale espagnole. Au départ, notre musique était une mélange de musique arabo-andalouse et de flamenco, nous avons évolué vers un son beaucoup plus contemporain. Sorte de musique andalouse contemporaine comme nous aimons la nommer.

«Dans une perspective plus historique, nous nous sommes inspirés d'un mélange culturel typique de l'Espagne médiévale sous domination musulmane, un espace culturel des plus dynamiques, où se vivaient à la fois conflits et coexistence positive de plusieurs cultures. Aujourd'hui, nous vivons dans des environnements culturels mondialisés qui s'entrechoquent et coexistent d'une manière comparable à l'Andalousie des Maures.»

Dans cette optique, Tarik et Julia Banzi ont refusé d'être des copy cats et ont assumé leurs prétentions de créateurs.

«Tarik, raconte son épouse, est aussi artiste visuel. Récemment il me faisait observer qu'aucun artiste visuel d'aujourd'hui n'essaie de reproduire la Mona Lisa, alors que tant de musiciens de notre époque reproduisent plus ou moins exactement la musique des époques antérieures. C'est souvent le cas dans les musiques du monde.»

Ainsi, Al Andalus s'est prêté à de multiples métissages contemporains.

« Par exemple, nous nous sommes impliqués dans le mouvement nuevo flamenco au cours des années 80. Tarik avait alors joué avec le grand Paco de Lucia, en plus d'influencer et de former nombre de jeunes musiciens flamenco en leur proposant l'ajout d'instruments orientaux comme l'oud et la derbouka. «, explique la guitariste et compositrice, aussi détentrice d'un doctorat en ethnomusicologie.

«Nous avons tous deux beaucoup enseigné, surtout en Espagne. Plusieurs membres de Radio Tarifa, par exemple, ont été nos étudiants lorsque nous vivions à Madrid. Leur approche est plus pop, c'est une version plus commerciale de notre approche je dirais. Alors que nous sommes davantage portés sur la création artistique sans objet commercial. Notre musique est sérieuse et complexe, notre contribution est personnelle... et nous n'avons pas l'ego.»

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Dans le cadre du Festival du monde arabe, Al-Andalus se produit ce soir, 20 h, à la 5e salle de la Place des Arts.