Pour Jamais seul (Warner), son premier album depuis ses ennuis de santé, Johnny Hallyday s'est entouré de jeunes musiciens dont Matthieu Chédid, alias -M- qui l'ont emmené hors des sentiers battus, pour un résultat frais et souvent surprenant mais manquant de cohérence.

La star du rock français, qui a frôlé la mort fin 2009 et a traversé une période de dépression, a conçu cet album comme un retour aux sources.

Le disque publié lundi a été enregistré «à l'ancienne» à Los Angeles. «Nous étions quatre ensemble, comme un groupe et nous avons enregistré comme dans les années 60-70, en direct», expliquait récemment Johnny dans un entretien à la radio RTL.

Le rockeur a fait appel à trois musiciens de la nouvelle génération: Vincent Polycarpe batteur du groupe Gush, Maxim Nucci (Yodelice) et Matthieu Chédid (-M-), qui signe la plupart des titres et réalise l'album.

L'entourage du chanteur avait annoncé un album brut au son blues, faisant espérer à certains un disque à la Johnny Cash. Il n'en est rien.

L'album est fortement marqué par les univers de Yodelice (dont il reprend un titre) et surtout de Matthieu Chédid. Fortement médiatisée, la rencontre entre celui-ci et Johnny Hallyday a été déterminante et l'album est aussi une sorte d'adoubement de -M- par le «taulier» du rock français.

Johnny se fond dans le style de «Mister Mystère» et flirte avec la guitare - omniprésente - du musicien, dont il loue régulièrement lors de ses interviews les qualités de «guitar hero».

Les deux hommes font d'ailleurs étalage de leur complicité sur le titre England où la voix haut perchée de l'un répond au timbre grave de l'autre.

Jamais seul s'ouvre sur un retour à la période des débuts de Johnny avec Paul et Mick, hommage aux Beatles et aux Stones dans le plus pur style du rock anglais des années 60.

Dès le deuxième morceau, l'auditeur fait un bond de dix ans en avant avec Guitar hero, autre hommage de Johnny à son «ami» Jimi Hendrix.

Le chanteur sort des schémas dans lesquels il s'était souvent enfermé dans ses derniers albums. Yodelice le transporte dans un Ouest mystique et crépusculaire sur Jamais seul (un des titres les plus réussis du disque où il évoque les épreuves de ces derniers mois), tandis que -M- l'emmène dans la savane africaine (Les herbes folles).

Dans ce voyage musical, qui manque parfois de cohérence, le bon (Elle a mis de l'eau, ode toute en retenue à sa femme Laeticia) côtoie le moins bon (Tanagra, reprise qui manque de délicatesse d'une chanson très explicite de Brigitte Fontaine).

Johnny Hallyday, qui a craint un temps avoir perdu sa voix après ses ennuis de santé, apparaît en forme.

Il prend des intonations chaudes sur certains titres, en érafle d'autres de sa voix rauque, pousse dans les aigüs sur quelques morceaux. Il s'essaye même plusieurs fois à une interprétation davantage parlée que chantée, pour un résultat plutôt réussi.

La plupart des titres bénéficient d'arrangements plus dépouillés qu'à l'accoutumée, qui laissent de l'espace à la voix et à l'interprétation.

Mais celle-ci pâtit de la faiblesse des textes, signés Matthieu Chédid et Hocine Merabet. Plutôt que de se nourrir du vécu du chanteur, ils oscillent trop souvent entre jeux de mots faciles («y a pas de polémique/entre Paul et Mick» sur Paul et Mick) et sujets creux («Dandy, je suis resté/Dandy, je resterai. C'est pas moi qui le dit/Ce sont les enfants qui ont grandi» sur Dandy).

Le nouvel album bénéficiera en France d'une campagne de promotion qui s'assimile à une déferlante médiatique, avec interviews fleuves dans la presse et soirée spéciale à la télévision.