Bien que les créateurs dénoncent à grands cris le téléchargement illégal de la musique, un nombre grandissant de mélomanes sont prêts à payer pour obtenir des pièces disponibles en ligne puisque, au Québec, la vente d'albums numériques - de toutes origines - a connu une croissance de 68 % en 2009 par rapport à l'année précédente

Ainsi, tout porte à croire qu'un plus grand nombre de fans de Coeur de pirate qui téléchargent ses chansons sur leur iPod ou tout autre lecteur MP3, par exemple, le font en déboursant l'argent de leur poche au même titre qu'ils passent à la caisse lorsqu'ils vont chez leur disquaire. C'est du moins ce que révèle une étude publiée la semaine dernière par l'Observatoire de la culture et des communications du Québec (OCCQ).

Les données, publiées le 10 juin, environ une semaine après le dépôt à Ottawa du projet de loi C-32 sur le droit d'auteur, témoignent d'une croissance du numérique.

Et les albums d'artistes québécois ont également bénéficié de cet engouement pour l'achat de pistes numériques. «En 2008, les produits québécois occupaient peu de place dans les ventes d'albums numériques, avec le quart des ventes (26 %) comparativement à la moitié (47 %) pour les CD, rapporte l'étude. Un an plus tard, la place occupée par les albums numériques québécois progresse sensiblement. C'est maintenant le tiers des albums numériques (35 %) qui ont au moins une composante québécoise.»

Le téléchargement illégal

Or, bien qu'il s'agisse d'une nouvelle réjouissante pour les créateurs, plusieurs associations d'artistes affirment que trop de pièces musicales sont encore téléchargées illégalement. Ils reprochent du même souffle au gouvernement de ne pas avoir inclus dans son projet de loi le concept de redevances, prélevées au moment de l'achat par le consommateur d'un outil de lecture numérique, qui seraient ensuite redistribuées aux créateurs. Un moyen de leur permettre d'être justement payés pour leur travail.

Selon l'ADISQ, si plus d'albums numériques sont vendus au détriment des bons vieux disques compacts, il y aura, au bout du compte, moins d'argent dans les poches des artistes. «L'Observatoire calcule le nombre de disques vendus, mais ne calcule pas la valeur, souligne Solange Drouin, vice-présidente aux affaires publiques et directrice générale de l'ADISQ. Un disque vendu (sur les tablettes des magasins) et un album numérique, ce n'est pas le même prix. Donc, le retour dans l'industrie n'est pas le même.» Selon les chiffres fournis par l'ADISQ, au Québec, les ventes de disques compacts - albums et simples d'artistes de toutes origines - sont en constante diminution, passant de 12,3 millions de dollars en 2002 à 9,3 millions en 2009.

«Au Québec, il y a environ une personne sur 10 qui fait du téléchargement de façon légale, souligne le président de l'Union des artistes (UDA), Raymond Legault. Dans le reste du Canada, c'est une personne sur quatre. Ça ne vient donc pas compenser pour les ventes d'albums en magasin.»

Même son de cloche du côté de la Société professionnelle des auteurs et des compositeurs du Québec (SPACQ). «La hausse des ventes du numérique, ça ne comble pas le manque à gagner qui a été créé», affirme le directeur général, Jean-Christian Céré.