La tendance lourde des reprises de chansons et des duos, phénomène assez récent dans ce dernier cas, s'est maintenue en 2009 au Québec.

Un coup d'oeil sur les relevés de Nielsen - SoundScan et LE Palmarès, la référence au Québec pour mesurer les ventes de CD et par téléchargement, confirme cet engouement.

Pour l'année qui se termine, quatre des 10 meilleurs vendeurs ont gravé sur CD des reprises: les académiciens de Star Académie 2009; le gagnant de l'émission, Maxime Landry; la blonde chanteuse Ima et The Lost Fingers qui ont récidivé avec un deuxième album.

«Fais-moi la tendresse» de Ginette Reno, qui arrive au premier rang des ventes, est composé de matériel original.

Mais si on prend uniquement la compilation de la semaine se terminant le 6 décembre, on comptait six albums de reprises dans le «top10», de Maxime Landry à Garou en passant par les artistes de la relève qui ont refait des titres de «Passe-Partout», et les incontournables chants de Noël des IMA, Marc Hervieux et Marie-Chantal Toupin.

En 2008, on avait compté quatre albums de reprises parmi les 10 plus gros vendeurs, comme cette année, mais un de duos, celui de Dan Bigras.

À propos de ce dernier genre d'album, les artistes bien établis ont sauté dans le train en marche. Jean-Pierre Ferland, Marjo et Eric Lapointe notamment ont lancé des albums où ils interprètent leurs chansons avec d'autres artistes.

Le producteur Paul Dupont-Hébert a été un précurseur en la matière en invitant d'abord Claude Dubois en 2007 à se lancer dans cette aventure des duos. Pour lui, la mode des téléchargements et l'utilisation des petits lecteurs numériques où chacun fait son propre palmarès ont changé la donne.

«Avant, on pouvait sortir un album avec un seul «hit» alors qu'aujourd'hui, il faut que l'album soit bon d'un bout à l'autre. Avec les reprises en duo, on a le choix des chansons. Et un succès demeure toujours un succès, même revisité», a-t-il expliqué.

Sylvie Gariépy de l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ) reconnaît que l'on voit une «vague de duos» découlant du succès obtenu par Claude Dubois il y a deux ans. Mais au sujet des reprises de chansons, il y en a toujours eu et il y en aura toujours, fait-elle valoir.

«Des disques de Noël, il y en a cinq à chaque année ici; le country en fait beaucoup aussi, de même que les artistes qui atteignent le cap des 25 ans», a-t-elle rappelé.

«L'une des clés des duos, a poursuivi M. Dupont-Hébert, est d'avoir des succès au complet et le choix des invités. Avec 12 bonnes chansons, il y a plus d'intention d'achat. C'est un regroupement unique, original. C'est même magique d'avoir l'interprète original et un invité de son choix, des pierres précieuses.»

«Dubois a vendu 300 000 copies de son album de duos. Ferland - avec 'Bijoux de famille» -  a déjà un disque d'or après deux mois et aura sûrement un disque platine. Cela prouve que l'on répond à un besoin», a dit le producteur qui lancera dans quelques mois un album fort attendu de Gilles Vigneault, flanqué des Ferland, Dufresne, Mouskouri, Aznavour et Béart.

Sa maison de production, Tandem.mu, vise au moins deux albums de duos par année mais elle n'oublie pas les albums originaux.

Selon Paul Dupont-Hébert, la production de duos donne aussi un bon coup de pouce à la production de matériel original. «Plus on fera de reprises, plus on fera de duos. Cette période n'est pas terminée. Car après, les gens se demandent quand arriveront les albums originaux. On met donc la table pour d'éventuels albums originaux. Et ça va créer une demande pour du matériel original» a-t-il insisté.

Chose certaine, pour les albums de reprise, l'ADISQ a décelé une tendance assez forte pour rendre hommage à un artiste lors de son gala annuel.

Cette année, c'est Sylvain Cossette qui a mérité le tout premier prix de la catégorie «Album de l'année - Reprises» avec son deuxième «70s», des reprises de succès rock. Cossette a vendu plus de 250 000 exemplaires des deux albums de la série «70s».

Certains seraient donc portés à dire que la musique québécoise va bien et vend bien grâce aux reprises et aux duos. Quoi qu'il en soit, et malgré un contexte économique difficile en 2009, les ventes n'ont pas été si mauvaises.

«On notera probablement, une fois arrivée au 31 décembre 2009, une légère baisse de deux pour cent des ventes de CD après une chute de 17 pour cent en 2008, a indiqué Claude Fortier de l'Observatoire de la culture et des communications. Mais le nombre de téléchargements de fichiers numériques a enregistré une hausse fulgurante de 60 pour cent. C'est énorme, mais c'est un peu moins que par les années passées compte tenu aussi que c'est un phénomène en croissance.»

Mais ni l'Observatoire, ni l'ADISQ n'ont creusé jusqu'ici le phénomène des albums de duos. Sauf que la réponse du public donne sans aucun doute le goût à des vétérans d'enregistrer une nouvelle version de leurs succès.