La belle époque du yéyé québécois ne s'est pas limitée aux Classels, aux Sultans, au Hou-Lops ou à César et ses Romains. Loin s'en faut.

De fait, ces groupes-vedettes n'étaient que la pointe de l'iceberg. Sous la surface, une multitude de petits orchestres ont aussi participé à la révolution pop des années 60. Ils avaient des noms d'enfer comme les Gorilles, les Impairs, les Lunours, les Trixons ou Goliath et ses Philistins. Mais leur carrière sans succès fut souvent courte, se limitant, dans certains cas, à un seul 45 tours et trois concerts dans un sous-sol d'église.

 

On en serait probablement restés là si les disques Mérite n'avaient décidé de lancer la collection Les Introuvables, consacrée aux groupes québécois oubliés des années 60 ainsi qu'aux chansons inédites de formations plus connues.

La série s'élève à 20 CD. Rien de moins. Calculez 24 chansons en moyenne par disque, et cela vous donne environ 480 morceaux à écouter. La bonne nouvelle, c'est que chaque volume est vendu séparément. La mauvaise, c'est qu'il faut gratter longtemps avant de dénicher LE bijou caché qui donnera tout son sens à ce monstrueux projet d'exhumation.

Soyons honnête: à moins d'être fana de yéyé, amateur de pop psychotronique ou tout simplement maso, l'expérience «Introuvables» peut s'avérer pénible.

Il s'est créé, dans le Québec des années 60, beaucoup de choses très intéressantes. C'était la naissance de notre industrie du rock. L'explosion d'une nouvelle génération. L'émergence des premiers monuments de notre star-system actuel (Pagliaro, Angélil, Nanette). Sauf que dans l'effervescence du yéyé, quantité n'a pas toujours rimé avec qualité. Tout le monde s'improvisait musicien et tout le monde se prétendait producteur. Dans la réalité, bien peu avaient le talent et la vision voulus.

Bref, on comprend assez vite pourquoi l'histoire a laissé ces groupes de côté. Les guitares sont mal accordées, ça fausse, les textes sont poches et tout le monde ou presque se prend maladroitement pour les Beatles. Des fois c'est drôle. La plupart du temps, pas vraiment.

Et pourtant. Même mauvais, ces «Introuvables» avaient leur importance. Témoins d'une époque en mutation, ils ont posé leur brique dans le grand mur du rock québécois. Les écouter, c'est mesurer le chemin parcouru depuis cette période d'essais-erreurs.

C'est aussi découvrir une poignée de groupes qui auraient probablement mérité un meilleur sort. Car bien sûr, tout n'est pas à jeter dans cette douloureuse collection de laissés-pour-compte. Denis et les Panthères, les Mykels, les Items, le Nouveau Testament, les Bohemians, Smokin'Wood, Sex, Bruce et la 7e Invention ou Les Dabsters n'ont peut-être pas marqué l'inconscient collectif. Mais ils ont laissé des chansons étonnantes, qui n'ont rien à envier au meilleur du rock garage, du funk psychédélique, du rhythm'n'blues ou de la pop AM.

À vous de les trouver.

Les Introuvables, volumes 1 à 20. Disques Mérite.