Ce qui frappe d'abord chez George Ezra, c'est sa voix. Une voix forte qui a empli le Centre Bell, lundi soir, en lever de rideau du concert de son compatriote britannique Sam Smith.

Cette voix profonde qui donne l'impression qu'il a au moins deux fois ses 21 ans et qu'il nous arrive tout droit du delta du Mississippi, George Ezra l'a découverte et adoptée vers l'âge de 16 ans, fasciné qu'il était par les vieux bluesmen américains. Plus jeune, il chantait faux.

«Ma soeur et mon petit frère chantaient très bien, moi pas, nous a-t-il dit lundi dans les coulisses du Centre Bell. C'était un son pas très plaisant. Ç'a été une décision très consciente de ma part d'essayer de chanter d'une voix profonde. C'est venu naturellement, très facilement.»

Ezra peut également utiliser sa voix de tête, comme il le fait à l'occasion dans les chansons de son premier album, Wanted on Voyage, qui, même s'il a fait un malheur au Royaume-Uni depuis son lancement en juin dernier, ne paraîtra chez nous que mardi prochain.

«L'important, c'est que je m'amuse, ajoute-t-il. Honnêtement, est-ce que j'imaginais qu'un jour, je partirais en tournée et que je serais à Montréal? Non. Mes parents sont tous deux enseignants et j'ai envisagé la possibilité d'enseigner moi aussi; d'ailleurs, je l'envisage encore.»

«Je sais très bien que je m'amuse plus que la plupart des gens de 21 ans, mais je ne peux pas prendre ça trop au sérieux parce que ce n'est pas de mon ressort. Si les gens aiment ma musique, tant mieux, et s'ils ne l'aiment pas, tant pis.»

George Ezra est l'un des grands favoris en vue du gala des Brit Awards qui aura lieu le 25 février - il est finaliste dans quatre catégories majeures, une de moins que Sam Smith. C'est beaucoup grâce à la chanson Budapest qu'ont reconnue les fans de Smith lundi. Le train pour Budapest qu'il a raté après une nuit bien arrosée en Suède aura permis à sa musique de faire le tour du monde.

«Avant de lancer mon album, j'ai craint qu'on me réduise à ma chanson Budapest. C'est pour ça que je suis si heureux que mon album marche si bien, particulièrement au Royaume-Uni», confie-t-il.

Comme Dylan

S'il a évité le piège de l'étoile filante dans son pays, c'est sans doute parce que l'album Wanted on Voyage est très diversifié, de la pop accrocheuse de Budapest à la complainte bluesée en intro de Did You Hear the Rain?, en passant par les ambiances folk et les sonorités antillaises.

Juste au moment où on a l'impression de commencer à cerner le personnage, voilà que l'album se termine sur Spectacular Rival, la chanson préférée d'Ezra dans laquelle on croirait entendre chanter un Jim Morrison ou un Nick Cave sur une musique de Depeche Mode.

Ezra pouffe de rire puis, très sérieusement, il acquiesce: «J'ai lu quelque part que Bob Dylan terminait un album avec une chanson un peu différente des précédentes de façon à se permettre d'aller dans cette direction par la suite si ça lui chantait. C'était une décision stratégique.»

«Je ne sais pas comment mon deuxième disque va sonner, mais si je décide d'être un peu plus sombre, ce ne sera pas un choc pour mon public qui ne se demandera pas d'où ça sort.»

Tout est permis pour ce jeune homme dont la chanson Stand By Your Gun rappelle Girls Just Wanna Have Fun - on peut d'ailleurs le voir reprendre le succès de Cyndi Lauper dans une vidéo de la BBC -, qui nous dit que l'humour noir dans sa chanson Drawing Board lui a été inspiré par Lou Reed et qui, s'il s'était écouté, aurait inséré entre les chansons de son album de petits numéros parodiques à la manière des artistes hip-hop.

C'est le même George Ezra qui, malgré son trac évident, a accepté de jouer la comédie aux côtés du grand acteur Ian McKellen pour les besoins de son vidéoclip Listen to the Man.

Après quelques concerts en Angleterre et la soirée des Brit Awards où il doit chanter, George Ezra sera de retour à Montréal, au Métropolis, le 3 mars, en première partie de l'Irlandais Hozier, un artiste avec lequel il a des affinités musicales certaines. «Paraît que Hozier est sympathique. J'ai très hâte.»