Présenté vendredi au Métropolis, le spectacle d'Animal Collective restera imprimé dans les coeurs et caboches de ceux qui y ont assisté. Vision, intensité, profondeur, générosité et grand plaisir de jouer se sont trouvés au confluent de cette performance remarquable.

Qui plus est, la scénographie était propice aux meilleures soirées: l'asymétrie des décors et des écrans rappelait l'environnement... des Pierrafeu! Le fond de scène évoquait une arche multicolore propice aux projections en 3D, sorte de caverne psychédélique sous laquelle s'exprimaient Avey Tare (David Portner), Panda Bear (Noah Lennox), Deakin (Josh Dibb), et Geologist (Brian Weitz).

Côté musique, il fut un temps où la contribution de ce quartette iconoclaste se limitait plus ou moins au studio, en ce sens que les concerts d'Animal Collective n'étaient pas à la hauteur de ses concepts brillants, créations musicales libérées de toutes contraintes «classiques» - furieux mélange de pop, électro d'avant-garde, bruitisme et art rock.

Apparus dans les années 90, ces artistes étaient parfaitement représentatifs de cette nouvelle pop de création à l'ère numérique, en ce sens que la maîtrise d'instruments «véritables» n'était pas essentielle à la probité des résultats. Sur les planches, cependant...

Comme tant de musiciens issus du monde des technologies numériques, ces artistes visionnaires ont saisi l'importance du rapport physique avec l'instrument lorsqu'il est question de se produire devant les fans. Lentement mais sûrement, ils ont appris à maîtriser les rudiments nécessaires à un jeu convenable devant public. Ils ont amélioré leur chant (surtout Avey Tare et Panda Bear) malgré les limites évidentes de chacun, ils ont amélioré leur doigté sur les cordes et les ivoires, ils ont appris à taper sur les peaux comme il se doit, ils ont réussi à improviser ici et maintenant.

Bien que Centipede HZ, leur dernier opus (et menu principal de leur nouveau spectacle), ne soit pas le plus réussi de leur discographie, ils proposaient encore vendredi l'une des principales avancées de la pop culture anglo-américaine depuis la fin des années 90. Il en fut ainsi parce que leurs enregistrements récents (rendus publics l'automne dernier) se bonifient en concert: improvisations et nouveaux sédiments de sons en rehaussent la facture - quinzaine de titres présentés en fondu enchaîné sur deux heures, soit huit minutes par chanson en moyenne ! Même résultat pour les relectures d'extraits des albums Merryweather Post Pavillon, Strawberry Jam, Feels ou encore du maxi Fall Be Kind.

Vendredi, nous n'avions peut-être pas devant nous les instrumentistes de l'heure (voix, claviers, échantillonneurs numériques, guitares, basse, percussions acoustiques et numériques, etc.), mais la maîtrise était bien assez convaincante pour sortir rassasiés de ce concert. Plusieurs années, donc, auront été nécessaires pour que cette musique visionnaire soit pleinement appréciée en temps réel. Nous y sommes enfin.

Liste des chansons au programme (avec l'aide de Setlist.fm)

Crimson - face B du 10¨ Applesauce

Moonjock - album Centipede HZ

Wide Eyed - album Centipede HZ

Today's Supernatural - album Centipede HZ

Did You See the Words - album Feels

New Town Burnout - album Centipede HZ

Monkey Riches - album Centipede HZ

I Think I Can -  maxi Fall Be Kind

Applesauce - album Centipede HZ

Pulleys - album Centipede HZ

Bluish - album Merryweather Post Pavillion

Brother Sport - album Merryweather Post Pavillion

Peacebone - album Strawbwerry Jam

Rappels :

What Would I Want? Sky - maxi Fall Be Kind

The Purple Bottle - album Feels