Les amateurs de country montréalais, parmi lesquels on a vu Roch Voisine, Ti-Guy Émond et quelques inconditionnels de Willie Nelson reconnaissables à leur longue queue de cheval, ont été choyés vendredi à la salle Wilfrid-Pelletier. Willie et Ray Price y ont donné un spectacle remarquable, mettant en valeur ce que cette musique du peuple a de plus beau, de plus touchant, de plus vibrant.

Willie n'a plus besoin de présentation. Dès son arrivée, on a acclamé la légende, mais aussi l'homme authentique qui s'est aussitôt mis à faire des grands signes des deux mains aux spectateurs. Une heure et demie plus tard, il signait des autographes et serrait la main de tous ceux qui se pressaient devant la scène. Entre les deux, de Whiskey River à Bloody Mary Morning - Willie a de la suite dans les idées - il a offert aux Montréalais un cadeau qu'ils n'oublieront pas de sitôt.

 

Si son concert de 2006 au Centre Bell m'avait semblé brouillon, celui de vendredi était exemplaire. Il y avait dans cette soirée tout ce qu'on aime de Willie. Vingt-neuf chansons pas banales, ses immortelles ou celles qu'il fait siennes dès l'instant où il les marque de sa voix nasillarde et d'un solo de guitare original, qu'il s'agisse de Hey Good Looking et Jambalaya de Hank Williams ou de Me&Bobby McGee - que le public a mis du temps à reconnaître - et Help Me Make it Through the Night de Kris Kristofferson.

On a applaudi tout autant le chanteur que l'animateur de foule - qui répondait «beer for my horses» chaque fois que Willie chantait «whiskey for my men» - et le guitariste unique qui laissait s'exprimer ses cinq musiciens dont son inséparable soeur Bobbie, cachée derrière son piano, et l'harmoniciste Mickey Raphael, aussi bon que discret.

Willie était sur scène depuis à peine 10 minutes quand il a invité Ray Price à chanter avec lui deux de ses classiques, Crazy et Night Life. Le contraste entre le hippie de 75 ans qui chante du nez et le monsieur de 83 ans en costume, très ancré dans la tradition, qui pousse sa voix de velours, était frappant, leur complicité et leur amour profond de la musique l'étaient tout autant.

En début de soirée, les musiciens de Ray Price étaient pas mal plus discrets - de toute ma vie, jamais je n'ai vu 11 musiciens - onze! - faire si peu de bruit. On voulait d'abord entendre le chanteur qui a enfilé des succès comme Crazy Arms et Heartaches by the Number, sans oublier Release Me, «une vieille chanson des années BH - before (Engelbert) Humperdinck» -, a-t-il dit. Oui, Ray Price a de l'humour. Et quand il s'est excusé d'un trou de mémoire en invoquant son grand âge pour enchaîner aussitôt avec une chanson sur les affres du temps, je me suis dit qu'il avait aussi le sens de l'à-propos...

On ne s'est pas ennuyé une seconde de Billy Bob Thornton et de ses Boxmasters. L'ex-monsieur Angelina Jolie a fait un fou de lui deux jours plus tôt à Toronto en boudant parce que l'animateur de la CBC Jian Ghomeshi venait de mentionner qu'il était aussi acteur à ses heures. Billy Bob a ajouté que le public canadien, trop tranquille à son goût, lui faisait penser à des «patates pilées pas de sauce». Au Massey Hall, le public torontois a hué Billy Bob qui, trouvant tout à coup que la sauce canadienne avait mauvais goût, a mis fin sur le champ à sa tournée, prétextant qu'un de ses musiciens avait la grippe. Quand André Ménard a annoncé au public montréalais que Billy Bob ne pouvait «pas être ici ce soir», on a entendu des applaudissements.