Attiré par le récital, comme bien d'autres chanteurs d'opéra, Patrick Mallette avait monté un programme Debussy-Duparc pour la Chapelle du Bon-Pasteur jeudi soir. Le genre n'attire jamais les foules, encore moins lorsque deux débats télévisés les sollicitent à la même heure.

Nous étions donc très peu nombreux. Le baryton montréalais de 32 ans a néanmoins livré une prestation parfaitement professionnelle et donné, je pense, son maximum.

 

On remarque tout d'abord le sérieux du programme: non pas 10 ou 12 compositeurs, comme certains et certaines, mais deux seulement, l'occasion d'un rapprochement intéressant.

Duparc survit à Debussy, mais il reste attaché au passé alors que l'autre regarde vers l'avenir. Patrick Mallette sait d'ailleurs adapter sa voix à la courbe musicale de chacun, quitte à changer quelques notes dans le presque atonal Debussy (où il faut vraiment avoir la partition pour s'en rendre compte!).

La voix même, sans être très puissante, est large et nourrie au grave. À partir du haut médium, elle a parfois tendance à se crisper, voire se détimbrer, et l'aigu est souvent forcé. On a même senti un léger enrouement jeudi soir. Que Patrick Mallette ait pu produire un récital aussi satisfaisant avec des moyens vocaux aussi limités, le résultat tient à bien des facteurs.

Il a livré son programme entier de mémoire, d'où cette concentration totale, toujours axée en même temps sur les paroles et la musique, qui lui donne un peu l'air sévère d'un jeune Golaud. Il chante très juste (bien qu'il ait un peu détonné dans son premier Duparc), il est musicien et il porte une grande attention à la diction. Même sans le texte devant soi, on ne perdait à peu près pas un mot. Son pianiste Martin Dubé, très poétique dans Debussy, très dramatique dans Duparc, a une grande part dans cette réussite.

Le fameux piano Fazioli du Bon-Pasteur est présentement en Europe pour restauration. En attendant son retour en janvier, un Steinway très orné, de 1910, occupe sa place pour quelques semaines et sera remplacé ensuite par un Steinway de 1880.