Loin des yeux, loin du coeur? Le Centre Bell n'affichait pas complet pour le retour du groupe Oasis, mais les 8500 irréductibles fans qui avaient acheté leurs billets n'ont rien perdu pour attendre cette belle soirée de rock. Vendredi soir, les redoutables frères Gallagher ont donné un spectacle sobre, musclé et ordonné. De la part de ces mauvais garçons anglais, voilà une performance exemplaire qui devrait faire réfléchir un certain Leloup...

L'histoire d'Oasis s'est écrite à coups de succès radio et de pains sur la gueule. Le parcours scénique du groupe est jalonné de fameux déraillements et d'excès publics. À Montréal cependant, les musiciens étaient là pour gâter leurs fans comme jamais ils ne l'avaient fait en 11 ans, offrant leurs meilleurs refrains, leurs guitares impériales, l'intensité de leurs chansons. Chose promise, chose due.Après les performances de Matt Costa et Ryan Adams & The Cardinals - une belle affiche qui a dignement fait le boulot -, Oasis a pris la scène d'assaut vers 22h, sur un plateau ouvert et sans artifices. Des rangées de projecteurs, quatre écrans en arrière-scène, des amplis alignés côte à côte. Et c'est tout.

Authentiquement rock. On ne s'en plaindra pas. Il y aurait eu lasers et feux d'artifice que nous n'aurions pas pour autant quitté des yeux les Gallagher pendant la centaine de minutes qu'a duré le concert.

Liam est monté le premier sur scène, alors que la foule acclamait bruyamment les héros britpop. Tout un chanteur - pas une grande voix, mais un ton et, surtout, un charisme. Une image, la sienne: le micro vissé sur son trépied, les lèvres de Liam qui donnent l'impression de s'y être accrochées, les jambes pliées, les mains dans le dos. Démentant la rumeur qui courait depuis le début de la tournée, sa voix portait plutôt bien, le texte parfaitement articulé même si le souffle paraissait court. À chaque chanson, c'est l'intention qui comptait, point.

Oasis a ouvert les vannes avec Rock & Roll Star, parfaite entrée en matière. Son frère Noel, chemise à carreaux et guitare sur les cuisses, se tient côté cour. Les Gallagher ne se sont adressé aucun mot de tout le concert, parlant d'ailleurs assez peu entre les chansons - des deux, c'est Noel qui s'est montré le plus chaleureux. Comme pour la scénographie, les chansons parlaient d'elles-mêmes.

Et de ce côté-là, les fans ont été servis. Notamment avec un aperçu de Dig Out Your Soul, le nouvel album, à paraître le 7 octobre prochain: le single Shock of Lightning, un rock dans le tapis, avec la psychédélique To Be Where There's Life, servie peu après Cigarettes and Alcohol (dédiée par Liam «aux Français dans la salle» !), la rigide Ain't Got Nothing et, plus tard au rappel, Fallin' Down. Verdict préliminaire: si le reste des nouvelles chansons est à la hauteur de celles-là, Oasis semble être de retour sur la bonne voie.

La première partie du spectacle est passée assez rapidement alors que nous attendions la sortie des gros canons. Ils se sont pointés avec Slide Away («Pour toutes les filles», a marmonné Liam), The Importance of Being Idle, l'imparable Wonderwall au cours de laquelle le chanteur s'est fait enterrer par la foule, puis Supersonic.

Le rappel valait à lui seul le prix du billet. En l'absence de Liam, retiré en coulisse, Noel - fameux à la guitare, étonnamment solide lorsqu'il chantait - a d'abord présenté aux fans le nouveau batteur pour ensuite offrir une mémorable version acoustique de Don't Look Back in Anger. Après Fallin' Down, Liam est revenu sur scène, annonçant sans cérémonie l'immense Champagne Supernova, avant de reprendre I Am the Walrus des Beatles. Et nous laisser béats et admiratifs.

Après ce concert, la preuve a été faite. Les groupes passent et se succèdent, mais Oasis résiste.