Nouvelle variation sur le thème des «sept péchés capitaux» choisi cette année par Montréal Baroque, la gourmandise et sa compagne l'ivrognerie étaient au menu samedi soir, avec deux concerts successifs dans la grande Salle de la Commune du Marché Bonsecours.

À 19h, l'Orchestre baroque Arion célébrait ses 30 ans avec un programme partagé entre Handel, amateur de bonne chère, et Telemann, célèbre pour ses «musiques de table». On annonçait pour 21 h le pianofortiste Robert Hill, d'Allemagne, dans un programme consacré à Wilhelm Friedemann Bach, «fils ivrogne» (sic) du grand J. S., mais comme l'accord de l'instrument n'était pas encore terminé à l'heure dite, j'ai simplement quitté les lieux, comme bien d'autres.

De toute façon, l'heure et demie d'Arion nous avait comblés. De Handel, la Sonate en trio op. 2 no 1, en si mineur, devait nous reporter aux origines mêmes d'Arion, c'est-à-dire au quatuor formé de Claire Guimond à la flûte traversière, Chantal Rémillard au violon et, pour la basse continue, Betsy MacMillan à la viole de gambe et Hank Knox au clavecin. Mme MacMillan étant souffrante, elle fut remplacée par la violoncelliste Amanda Keesmaat. Ce Handel ainsi que le Quatuor parisien en mi mineur de Telemann, aux demi-teintes raffinées, nous firent donc retrouver presque inchangé l'Arion de 1981 qui se produisait alors à l'Église luthérienne allemande de la rue Jeanne-Mance.

Le quatuor original s'agrandit graduellement pour devenir l'Orchestre baroque Arion qui, samedi soir, réunissait 13 musiciens (ils sont parfois plus nombreux encore). L'augmentation des effectifs a conduit à l'élargissement, longtemps souhaité, du répertoire. C'est ainsi qu'il fut possible de programmer, de Telemann, des extraits substantiels de la très longue Ouverture en mi mineur et le Concerto pour flûte traversière et flûte à bec dans la même tonalité, ainsi que le premier Concerto grosso de l'opus 6 de Handel.

Le programme entier mit en relief l'une des belles qualités d'Arion : le sens aigu du contraste, qui souligne le caractère de chacun des mouvements d'une même oeuvre. Ainsi, dans le double concerto de Telemann, ce tendre Largo sur pizzicatos que venait secouer un Presto final presque sauvage. Mention également aux deux flûtes bien harmonisées et aux tenues de note bien timbrées de Sophie Larivière à l'aigu de la flûte à bec.    

Le double thème gourmandise-ivrognerie dépassa le cadre musical. La directrice et fondatrice de Montréal Baroque, Susie Napper, avait préparé de ses mains des «petits plaisirs gourmands» qu'elle fit servir à l'auditoire après en avoir décrit la composition du haut de la galerie surplombant la salle. Il y avait là du rhum à l'orange, des framboises au chocolat blanc, de petits baklavas, une sorte de crème blanche, aussi, dont je n'ai pas saisi le nom.

ORCHESTRE BAROQUE ARION. Samedi soir, Salle de la Commune du Marché Bonsecours. Dans le cadre du Festival Montréal Baroque.