De prime abord, l'écoute d'Infinitude laisse au jazzophile l'impression de parcourir des territoires familiers. Éventail harmonique connu, thèmes mélodiques connus, rythmes connus, instrumentation connue mais... Comme c'est toujours le cas lorsqu'on fréquente des formes devenues classiques, l'espace créatif ne se trouve pas d'entrée de jeu.

Si toutefois on est attentif, on a tôt fait de le débusquer dans l'articulation et dans la singularité des interprètes/improvisateurs. Qui plus est, on le trouve à travers une conception sonore de la nordicité qui étoffe la facture d'Infinitude; ne faut-il pas de vrais hivers, d'immenses étendues de conifères et d'infinis chapelets de lacs pour concevoir un tel jazz?

Évoluant dans les zones septentrionales, les soeurs Christine (saxophones) et Ingrid (trompette, mélodica, kalimba) Jensen sont parmi les actrices les plus pertinentes de cet hémisphère, leur liaison Montréal-New York semble d'autant plus fluide.

La trompette virtuose d'Ingrid y est une fois de plus suave, les saxos (soprano et alto) de Christine, plus que défendables, la section rythmique, irréprochable et on découvre les innovations texturales du guitariste Ben Monder, passé maître dans un jeu «classique» qu'il étoffe désormais par de brillants effets de saturation.

Prêts pour affronter le froid?

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JAZZ. Infinitude. Ingrid & Christine Jensen avec Ben Monder. Whirlwind Recordings.