Lulu Hughes, Sylvie Desgroseilliers, Kim Richardson, Mélissa Bédard, etc. Bien des chanteuses québécoises ont été inspirées par la voix d'Aretha Franklin, illuminées et transportées par la force de sa présence artistique.

Hier, Lulu Hughes, qui chante Respect depuis 30 ans, était ébranlée par la mort de l'artiste américaine. «Elle aura été ma plus grande influence musicale, dit la chanteuse québécoise reconnue pour sa voix puissante. Vocalement, je veux le dire dans des mots qui ne sonneront pas prétentieux, elle avait exactement mon registre vocal, donc j'étais capable de chanter ses chansons. Des chansons qui m'ont touchée à l'âme dès que je les ai entendues la première fois.»

Lulu Hughes a tellement aimé Franklin qu'elle est alors partie chanter au Montreal Jubilation Gospel Choir fondé par Trevor Payne.

«J'étais une petite Blanche québécoise francophone retenue par la chorale parce que j'arrivais à chanter de l'Aretha Franklin! Pour moi, elle n'était pas seulement la reine de la soul, mais la reine de l'univers!»

En retrait du Montreal Jubilation Gospel Choir depuis quelque temps, Trevor Payne croit qu'un hommage à Aretha Franklin devrait être présenté par sa chorale en décembre prochain. «Elle le mérite, dit-il. Son voyage est terminé. Maintenant, elle est à la maison et on doit la célébrer.»

Au même niveau qu'Ella

«La musique américaine et la musique en général perdent une icône d'un panthéon très élevé comprenant ceux qui ont inventé la musique noire, dit André Ménard. Aretha est au même rang que les Ella Fitzgerald, Miles Davis et Ray Charles.»

Pour le fondateur du Festival international de jazz de Montréal, Aretha Franklin présentait la caractéristique d'une voix qu'elle pouvait pousser très fort et très haut tout en lui donnant de la retenue.

«Elle avait un vrai style naturel. Ça ne sentait ni l'effort ni l'affectation. La soul existait avant elle, mais elle l'a élevée à un niveau extraordinairement haut. Qu'auraient fait Whitney Houston et Beyoncé sans Aretha Franklin?», a déclaré André Ménard.

«C'est une des dernières grandes voix qui disparaît, dit le chroniqueur musical Mike Gauthier. Elle a inspiré les chanteuses à voix, notamment Céline Dion, avec qui elle a chanté (You Make Me Feel Like) A Natural Woman, en 1998.»

Aretha Franklin a ouvert la voie à bien des interprètes noires, dit de son côté l'actrice et chanteuse Kim Richardson. «Après elle, le chemin a été beaucoup plus facile. Elle était une chanteuse unique et une pianiste extraordinaire.»

Lulu Hughes estime qu'une grosse page culturelle se tourne avec la disparition d'Aretha Franklin. «Elle fait partie d'une génération qui a changé la face de l'art, dit-elle. D'Elvis à James Brown, en passant par les Beatles et Aretha. Aujourd'hui, il n'y a pas grand monde qui m'inspire autant. Qui va prendre la relève? On écoute de la musique aujourd'hui pour ne plus penser, alors que dans les années 60 et 70, on le faisait pour changer le monde.»

Lulu Hughes rendra hommage à Aretha Franklin lors du Rick Hughes Show, ce soir, à 20 h, à Saint-Mathieu-de-Beloeil. «Je chanterai Respect, dit-elle, car elle veut tellement dire, cette chanson. Elle concerne les femmes, les hommes, les Noirs, elle concerne tout le monde.» 

Quelques réactions

> Win Butler (Arcade Fire): «Aretha était la plus grande de tous les temps. J'ai joué trois chansons d'affilée lors de ma soirée à Berlin, [hier] soir. Sa musique vivra pour toujours.»

> Marie Montpetit, ministre la Culture du Québec: «Une légende s'éteint aujourd'hui, mais sa voix puissante et émouvante que j'ai tant écoutée résonnera pour toujours. Respect. Aretha Franklin, reine de la soul.»

> Valérie Plante, mairesse de Montréal: «Aretha Franklin était une grande femme de la musique soul qui a inspiré et pavé la voie à toute une génération de chanteuses. Qui n'a jamais chanté Respect dans sa vie? Une grande perte pour la musique.»

> Charles Biddle Jr: «RIP Aretha. Difficile de croire qu'Aretha Franklin a poussé son dernier souffle. Que l'âme de la Reine du soul a quitté son corps. Qu'elle s'est éteinte chez elle jeudi, près de Detroit, à 76 ans, paisible et entourée des siens, finalement vaincue par la maladie. Aretha morte ? C'est comme si une église s'écroulait.»