Pas une année ne passe sans que Patrick Bruel ne rende visite à son public québécois. Après son aventure symphonique en mai dernier, le chanteur est de retour dans le cadre de Bruel chante Barbara, une tournée hommage à la mythique chanteuse, dont il a interprété les plus grands titres sur l'album Très souvent, je pense à vous... La série de spectacles commence ce soir et se terminera au Théâtre Maisonneuve le 22 avril.

Cette fois-ci, vous n'avez pas voyagé léger : il paraît que vous avez fait venir les décors de votre spectacle au Québec. À quoi doit-on s'attendre avec Bruel chante Barbara ?

À travers les décors, on retrouve le côté classique du rideau rouge, mais qui change parfois de couleur. Il y a également des panneaux qui tournent et qui transforment la scène en quelque chose de très contemporain. Il y a aussi une grande ligne blanche qui traverse la scène, un peu comme une passerelle. J'aimais beaucoup l'idée de mélanger le contemporain avec le côté plus classique du théâtre. Dans ce spectacle, j'ai choisi de raconter une partie de mon histoire à travers les mots de Barbara. Il y a une sorte de mise en abyme qui n'était pas prévue au départ. Au début des répétitions, on n'avait même pas d'ordre établi dans les chansons ! J'ai naturellement choisi de revenir au plus simple, au commencement, au moment où ma maman m'a fait découvrir l'univers de Barbara. En partant de là, je déroule le fil et, tout naturellement, l'histoire coule toute seule. Le 22 avril marquera le dernier concert de cette tournée avec Barbara. J'ai décidé d'ajouter certaines de mes chansons, et ça sera une sorte de petite fête avec quelques surprises.

Quel est votre premier souvenir de Barbara ?

Ma mère avait vu le spectacle de Barbara à Bobino et avait acheté l'album. Elle le mettait à la maison et, va savoir pourquoi, la chanson Madame me plaisait particulièrement. Il y avait aussi Mourir pour mourir qui me faisait le même effet et que j'aimais réécouter. J'avais 8 ans et je n'ai jamais bien compris pourquoi ça me touchait autant, pourquoi cette femme avait à ce point toujours fait partie de mon parcours. J'ai eu une vague piste d'explication quand j'ai commencé cette tournée et que j'ai rencontré des enfants de 8 à 12 ans qui accompagnaient leurs parents. Ils étaient eux aussi très touchés par ces chansons. À travers leurs mots, je me suis beaucoup retrouvé. Il doit y avoir quelque chose d'assez universel, d'enveloppant chez Barbara.

Quelle est votre chanson favorite de son répertoire ?

C'est très difficile. J'ai un plaisir fou à les rencontrer au fur et à mesure du spectacle. J'adore Drouot, qui est pour moi peut-être la plus aboutie, la plus belle de ses chansons. Elle parle de cette femme dans la salle des ventes qui va devoir laisser partir toute son histoire à travers un objet. C'est joli, et c'est d'ailleurs le moment où le spectacle bascule, où le public curieux qui est venu sans trop connaître les chansons se fait « choper » par cette chanson. Ils entrent alors vraiment dans l'univers.

Vous avez tardé à rencontrer Barbara. Pourquoi et comment s'est passée cette rencontre ?

J'aurais pu la rencontrer plus tôt, car j'en avais l'occasion. Mais j'avais peur d'être un peu déçu. On hésite souvent à s'approcher de ses idoles ! Mais je suis content qu'on m'ait presque obligé à aller vers elle, car ç'a été une vraie belle rencontre, avec quelque chose d'extrêmement simple, d'immédiat, à l'opposé de l'image qu'on peut se faire de la femme très austère, renfermée qu'elle était sur scène avec ses chansons. Ç'a été une rencontre après son spectacle à Mogador, ponctuée de beaucoup de tendresse par rapport à moi et à mon travail. Elle m'a beaucoup encouragé. Quelques jours plus tard, j'ai emmené ma maman voir le spectacle. Ma mère m'avait fait rencontrer Barbara, et je la lui présentais. La boucle était bouclée.

Quelle a été la plus grande difficulté dans le fait d'interpréter les chansons de Barbara ?

Ce n'était pas difficile pour moi, car je suis un homme. Il n'y a pas de comparaison possible. Je ne peux en aucun cas lui ressembler ! Le principe était d'oublier l'interprète et de se concentrer sur l'oeuvre, comme on s'attaquerait à du Molière ou à du Rimbaud. Sa présence sur scène a bien sûr plané au-dessus de nous de manière constante, mais on n'est jamais rentré dans l'imitation. Il y a un côté piano-voix-guitare très simple dans le spectacle, mais aussi des propositions plus pop-électro plus fortes qui pourraient lui ressembler, car elle était très audacieuse.

PHOTO Archives LA PRESSE

La chanteuse française Barbara photographiée à Montréal en juin 1970