Prince a rendu l'âme hier matin dans ses studios de Paisley Park, à Chanhassen, au Minnesota, exactement un mois après s'être produit à Montréal.

« Je n'en reviens pas qu'on apprenne sa mort un mois plus tard. Je ne comprends pas, lance Herby Moreau. La chanson que je vais écouter en boucle aujourd'hui est Sometimes It Snows in April. »

« Je n'avais aucune idée qu'il était malade. À trois heures du matin, Prince était même au Muzique », boîte de nuit du boulevard Saint-Laurent, raconte Rubin Fogel, le promoteur montréalais qui a produit à quelques jours d'avis les deux spectacles en un soir que Prince a donnés à la salle du Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts, le 21 mars dernier.

Nous étions parmi les 1500 spectateurs de la première représentation. « À chacune de ses visites à Montréal, avons-nous écrit, Prince se réinvente et donne envie d'être du prochain rendez-vous. Un grand artiste, un grand musicien, un grand séducteur et un anticonformiste. »

Prince a offert une soirée intimiste mémorable. « Le rêve dont nous avons tous rêvé », a-t-il dit à la foule avec son ton et ses airs aguicheurs. Dans une ambiance de piano-bar, nous avons eu droit à des titres méconnus et à des succès comme Look at Me, Little Red Corvette et I Would Die 4 U.

Herby Moreau avait une place dans les premières rangées avec son fils. 

« J'ai payé 300 $ chaque billet et je dirais que c'est le meilleur investissement de ma vie, sachant que Prince allait partir. »

- Herby Moreau

Depuis une semaine, on savait l'icône du funk malade. La semaine dernière, le pilote de son avion privé a dû atterrir d'urgence pour le conduire à l'hôpital. Un représentant de son équipe a alors affirmé que la légende musicale souffrait d'une grippe. Le lendemain, Prince est remonté sur scène à Atlanta.

Selon l'Associated Press, Prince Rogers Nelson a été retrouvé inerte dans l'ascenseur de son studio d'enregistrement. Les secours ont été incapables de le réanimer. Hier soir, il a été confirmé que Prince avait fait une surdose d'opiacés six jours avant.

« Je suis sous le choc, nous disait hier après-midi Herby Moreau, qui a vu Prince une dizaine de fois en spectacle et dans des fêtes privées où la star arrivait en surprise. Prince cultivait le mystère et sa mort ajoute au mythe. »

ANNÉE FUNESTE

L'année 2016 est funeste pour l'industrie de la musique. Hier, Prince a rejoint David Bowie, Lemmy Kilmister, Scott Weiland et Glenn Frey.

Contrairement à d'autres artistes en fin de carrière, Prince était au sommet de sa forme sur la scène du Théâtre Maisonneuve. « Avec son look funk-disco, son corps svelte et son afro, Prince occultait ses 57 ans », avons-nous écrit dans notre critique du spectacle.

La tournée solo Piano & A Microphone succédait à un spectacle Centre Bell donné il y a moins d'un an dans une ambiance intime tout autre.

Prince a raconté au public du Théâtre Maisonneuve qu'il avait appris à jouer du piano dans l'ombre de son père, le pianiste jazz John L. Nelson du trio Prince Rogers Trio, à qui il doit son nom. 

« J'ai appris surtout [en regardant mon père]... je ne crois pas que le funk s'apprenne dans les livres. C'est une question d'espace. »

- Prince lors de son concert au Théâtre Maisonneuve le 21 mars dernier 

Il fallait être en forme pour donner deux spectacles en un soir, puis prolonger la soirée au Muzique jusqu'au petit matin. « Bowie, on ne l'a pas vu durant les années précédant sa mort. Prince était toujours extrêmement actif », souligne Laurent Saulnier du Festival de jazz, qui a reçu deux fois le prolifique artiste.

C'est aussi relativement à la dernière minute que Prince avait décidé de se produire au Métropolis pour deux soirs en 2011. « Il a commencé à 23 h 30 et il a fini à 3 h 30, poursuit Laurent Saulnier. Plus personne ou presque ne fait cela. Prince était un musicien exceptionnel, mais surtout un vrai showman. »

Prince a influencé la musique en faisant les choses à sa manière, notamment en se retirant de YouTube et des réseaux sociaux. « Prince contrôlait tout », dit Laurent Saulnier.

Pour l'anecdote, Prince a relu les communiqués de presse - et approuvé le visuel - qui devaient annoncer ses deux derniers spectacles à Montréal, ville où il aimait se produire. « Il a dirigé sa carrière à son rythme et il faisait ce qu'il voulait. Il était out of the box », conclut Rubin Fogel.

PRINCE À MONTRÉAL

• 29 mars 1993, au Forum

• 6 juin 1997, salle Wilfrid-Pelletier

• 6 juillet 2001, salle Wilfrid-Pelletier

• 18 juin 2002, Centre Molson

• 24 et 25 juin 2011, Métropolis

• 2 décembre 2011, Centre Bell

• 23 mai 2015, Centre Bell

• 21 mars 2016, Théâtre Maisonneuve