De Lou Reed à David Bowie, le rock a récemment perdu certaines de ses plus belles étoiles mais Iggy Pop continue d'entretenir la flamme avec un 22e album à la fois rugueux et introspectif, composé avec Josh Homme.

Une célèbre photo prise en 1972 à Londres montrait les trois légendes bras dessus-bras dessous: Lou Reed avec ses lunettes noires, David Bowie avec sa coupe de Ziggy Stardust et l'intenable Iggy Pop entre les deux, l'air goguenard, un paquet de cigarettes à la bouche.

Le premier est mort à l'automne 2013, le deuxième vient de tirer sa révérence, mais le «survivant», l'Américain James Newel Österberg Jr, dit Iggy Pop, n'en a pas fini avec le rock à bientôt 69 ans.

Pour ses deux dernières expériences en solo, l'«Iguane» avait un peu changé de registre avec un album (Préliminaires) inspiré par un roman de l'écrivain français Michel Houellebecq et un disque de reprises (Après) où sa voix rauque revisitait quelques classiques de la chanson française (Georges Brassens, Henri Salvador, Joe Dassin, Édith Piaf).

Le chanteur des Stooges conserve, dans ce nouveau disque qui paraît vendredi, l'attitude du crooner et le goût certain de la mélodie, mais revient à un univers plus rugueux. Sous la houlette de Josh Homme, leader des Queens of the Stone Age (QOTSA), l'un des grands groupes de rock actuels, mais aussi cofondateur des Eagles of the Death Metal (EODM), le groupe qui jouait au Bataclan, à Paris, lors de l'attentat jihadiste du 13 novembre 2015.

Josh Homme, 42 ans, véritable chef d'orchestre de ce projet élaboré dans le plus grand secret dans le désert californien, a constitué pour l'occasion un «supergroupe» avec deux autres invités, Matt Helders (batteur des Arctic Monkeys) et Dean Fertita (Queens of the Stone Age, The Dead Weather).

Sur les traces de Bowie

Avec l'ambition de pousser Iggy Pop vers de nouveaux territoires, un peu comme l'avait fait David Bowie en produisant les deux premiers albums solo de Iggy Pop, The Idiot et Lust for Life (1977 tous les deux). Les guitares ont le premier rôle dans ces neuf titres aux ambiances particulièrement variées, où flotte parfois celle du plancher de danse (Sunday) ou des feux de camps indiens (Vulture).

«Pas mal de mecs de mon âge ne se remettent plus en cause dans le boulot parce qu'une fois qu'on devient une légende, on n'a pas envie que les gens vous lancent des défis», relève Iggy Pop dans le dossier de presse, parfois étonné de sa propre longévité malgré ses excès en tous genres.

Très en voix, Iggy Pop se fait un brin introspectif dans ce disque: il évoque l'au-delà (American Valhalla, en référence au valhalla, le paradis viking), se souvient d'amours anciens (Gardenia) ou encore de ses années passées à Berlin (German Days).

«Mon nouvel album ne parle que de ça, de l'âge. De ce qui se passe quand on se sent perdre sa force, avec cette impression d'aspirer de l'énergie de l'autre sans rien pouvoir donner en retour», a assuré le chanteur dans une récente interview à l'hebdomadaire culturel Télérama.

Mais pas d'idées noires à l'horizon, malgré le titre Post Pop Depression de ce 17e album solo d'Iggy Pop - son 22e en comptant les cinq enregistrés avec les Stooges.

Iggy Pop et Josh Homme seront en mai en Europe pour une série de concerts très attendus. Les places pour la date parisienne du 15 mai se sont arrachées en quelques heures.

Josh Homme a raconté dans le New York Times l'importance prise par ce projet avec Iggy Pop, après les attentats du 13 novembre. «Le fait d'avoir à travailler là-dessus m'a sauvé», a souligné le cofondateur des Eagles of Death Metal. S'il n'était pas au Bataclan lors de l'attaque, il a participé au concert qui a marqué le retour des EODM à Paris, en février à l'Olympia.