Douloureux mais nécessaire. Le retour des Eagles of Death Metal sur une scène parisienne, mardi soir, trois mois après l'attaque contre le Bataclan, «est une thérapie» pour le chanteur du groupe américain, Jesse Hughes.

Il marque une pause, retire ses lunettes aux verres roses et essuie les larmes qui coulent abondamment jusqu'à sa moustache tombante. Puis Jesse Hughes attrape une cigarette et peut reprendre son récit, dans cette chambre d'hôtel à Paris, 24 heures avant de monter sur la scène de l'Olympia pour une soirée chargée d'émotion.

«J'ai peur, j'ai vraiment peur», dit-il à l'AFP.

«J'espère être capable de monter sur cette scène et être plus fort que je le suis maintenant. Je ne veux pas m'écrouler devant tout le monde, je ne veux décevoir personne, c'est ma plus grande crainte», ajoute le chanteur.

«Eux, ils ne m'ont pas laissé tomber», dit-il au sujet des fans du groupe qu'ils appellent toujours ses «amis».

Le chanteur raconte cet épisode incroyable pendant l'attaque du Bataclan: «Je fuyais pour sauver ma vie dans la ruelle, un type à côté de moi avait du mal à marcher, j'ai vu qu'il saignait beaucoup sur le côté, je ne sais pas ce qu'il est devenu. Il a respiré un grand coup et il m'a dit: «Ton dernier concert était franchement mieux...»»

Il rit, tripote nerveusement la cartouche de 10 paquets de cigarettes qu'il a apportée avec lui, et tente de contenir les nouvelles larmes qui apparaissent. «C'est incroyablement courageux, une telle blague. C'est l'exemple que je vais m'efforcer de suivre.»

Contrairement au concert du 13 novembre, il aura cette fois à ses côtés Josh Homme, avec qui il a fondé le groupe il y a bientôt 20 ans. Lequel apparaît bientôt dans la chambre pour épauler son acolyte lors de l'interview, à peine débarqué des États-Unis.

Le rock? «De l'amusement»

«Josh est le meilleur ami qu'on puisse espérer», dit Jesse Hughes. «Ce sera très différent pour moi de voir mon meilleur ami là» pendant le concert.

La soirée de l'Olympia, en présence de fans ayant acheté leurs billets mais aussi de survivants du Bataclan invités? «Ce sera un concert de rock normal», continue le chanteur.

«Le rock'n'roll, pour moi, c'est de l'amusement. Je ne vais laisser personne m'enlever ça, ni à mes amis», ajoute-t-il. «Je veux voir mes amis sourire. Je veux revoir tous les sourires de ce soir-là» avant l'attaque.

À Stockholm, samedi, où le groupe a relancé sa tournée mondiale, il avait estimé que ce retour à Paris relevait d'une volonté divine. Cette fois, il se contente de souligner que «c'est le moment (...) de retirer les cellules cancéreuses».

«C'est un cancer psychologique qui affecte le monde entier et je pense que nous nous apprêtons à voir l'une des plus belles choses possibles: des gens qui vont refuser que ce cancer prenne le dessus», continue Jesse Hughes.

Si certains fans ont renoncé à l'Olympia, jugeant qu'il était «trop tôt», ce concert constitue «une thérapie» pour le chanteur. «Je comprends ce que ressentent les gens qui ne peuvent pas venir. Je sais que la bonne chose à faire est aussi la plus difficile».

«Le fait que nous venions aidera même ceux qui ne peuvent pas venir», estime pour sa part Josh Homme. Et pour ceux qui seront dans la salle, «j'espère qu'ils pourront laisser un peu de cette merde et faire de la place pour de bonnes choses», ajoute celui qu'on connaît aussi comme le leader des Queens of the Stone Age, qui s'installe généralement derrière la batterie quand il joue avec les Eagles.