Voici cinq artistes qui illustrent l'importance du rap de différentes façons, a dit O'Shea Jackson Jr., avant que lui et son père Ice Cube ne remettent à Kendrick Lamar le prix du meilleur album de rap tout au début du 58e gala des prix Grammy, qui avait lieu hier soir à Los Angeles.

Pendant son discours, Kendrick Lamar a souligné l'importance de Dieu et de l'éthique de travail («put God first and put work ethic behind it», a-t-il déclaré), qui lui ont permis de distinguer le bien du mal et de vouloir devenir une meilleure personne.

Il a rappelé ses racines à Compton (quartier de Los Angeles au coeur du film Straight Outta Compton, qui a connu un grand succès critique, produit par Dr Dre et qui rappelle les débuts du groupe N.W.A.). Au fait, Lamar est le premier rappeur de la côte Ouest à remporter le prix du meilleur album de rap. Une injustice jusque-là, décriait-on.

Peut-être (sans doute) que tout était arrangé, mais avec ses compatriotes de Compton O'Shea Jackson Jr. et Ice Cube qui lui ont remis un prix, l'Académie semblait envoyer un message clair en début de soirée. Ce sera la soirée du rap et de Kendrick Lamar, qui avait déjà remporté quatre prix hors d'ondes dans des sous-catégories rap (meilleures chanson, performance et collaboration) et qui a partagé celui du meilleur clip avec Taylor Swift pour Bad Blood.

Taylor Swift réplique à Kanye West

Alors que beaucoup de gens espéraient voir Kendrick Lamar remporter en fin de soirée le plus prestigieux Grammy de l'album de l'année, c'est justement le nom Taylor Swift qui se trouvait dans l'enveloppe du gagnant.

Ce n'est donc pas la cause du rap et des Noirs qui a été mise de l'avant en fin de gala, mais celle des femmes. Sans le nommer, Taylor Swift s'en est pris à Kanye West, qui clame sur son dernier album The Life of Pablo que la chanteuse (qu'il qualifie de bitch) lui doit son succès. 

Dans son discours de remerciement, Swift (la première artiste féminine de l'histoire à remporter deux fois le Grammy de l'album de l'année) a prié les jeunes femmes de ne jamais laisser un homme prendre le crédit de leurs succès. Et vlan!

Autre message: celui de Neil R. Portnow, président de la National Academy of Recording Arts and Sciences (NARAS), qui a dénoncé les faibles redevances des services d'écoute en continu. Il en craint l'impact pour les artistes de la relève.

En vrac

Le chanteur R & B torontois The Weeknd a quitté le Staples Center avec deux trophées, ceux du meilleur album urbain contemporain et de la performance R & B pour Earned It. Skrillex et Diplo ont remporté deux prix pour leur projet Jack Ü, dont le meilleur album dance-électronique.

Comme Taylor Swift, Alabama Shakes a remporté trois prix: meilleur album alternatif, chanson et performance rock. «Quand mon bassiste et moi avons commencé à faire de la musique au secondaire, c'était pour le plaisir et pas pour gagner un prix», a dit avec son accent du Sud la charismatique chanteuse Brittany Howard.

Quant à l'enregistrement de l'année, il est allé à Uptown Funk, le tube de Mark Ronson où figure Bruno Mars. Pleinement mérité.

Comme prévu, la vedette du Kentucky Chris Stapleton s'est illustrée dans trois catégories country. Les Grammy couvrent large dans le spectre de la musique. Dans les différents genres en lice, citons parmi les artistes récompensés hier Angelique Kidjo (meilleur album world), Muse (rock), Morgan Heritage (reggae), Béla Fleck & Abigail Washburn (folk), Buddy Guy (blues), Ricky Martin (pop latine), Cécile McLorin Salvant (jazz vocal) et sans surprise Hamilton (comédie musicale).

Surprise

Surprise, vers 21 h 10, quand Ed Sheeran a reçu de Stevie Wonder son premier trophée Grammy à vie pour la chanson de l'année (Thinking Out Loud). L'auteur-compositeur-interprète britannique rouquin était flatté de cet honneur. Il a salué ses parents qui faisaient le voyage depuis l'Angleterre pour la quatrième fois et qui pouvaient enfin le voir gagner un prix Grammy.

Autre surprise, ou du moins une catégorie où le gagnant était imprévisible, celle de la révélation de l'année. C'est en larmes que Meghan Trainor est montée sur scène pour aller chercher son prix devant son père aussi ému qu'elle. La chanteuse pop à qui l'on doit le tube All About That Bass a remercié le magnat d'Epic Records L.A. Reid, qui lui a donné sa chance.

Des bons et mauvais coups

Cela devait être un grand moment de la soirée quand Bruno Mars a présenté Adele pour la chanson qu'il a coécrite avec elle, la ballade All I Ask. Or, des problèmes de son avec le piano ont complètement gâché le numéro. Adele a fait comme si de rien n'était, mais c'était raté... Disons que des techniciens ont dû faire de l'insomnie, hier soir.

Alors que trop de ballades convenues ont ponctué le début du gala et que l'animateur LL Cool J était accessoire, le meilleur était pour la deuxième moitié du gala (quoique...). Très réussie, la version plus orchestrée et lo-tempo du tube Where Are U Now avec Justin Bieber, Skrillex, Diplo et d'autres musiciens.

L'hommage de Lady Gaga à feu David Bowie n'a pas fait l'unanimité, ni celui des membres de The Hollywood Vampires (groupe amical de Johnny Depp, Alice Cooper, Joe Perry, Duff McKagan et Matt Sorum) à Lemmy Kilmister, défunt membre de Motörhead. Dans les deux cas, l'ensemble frôlait la caricature, mais était pour le moins divertissant.

Le mélange des genres

La cérémonie des Grammy permet des mélanges insoupçonnés de genres et d'artistes qui semblent de prime abord avoir peu en commun. Hier soir, il était savoureux de voir Dave Grohl chanter à pleins poumons All Night Long de Lionel Richie, à qui l'on rendait hommage. L'acteur Don Cheadle a annoncé la prestation puissante de Kendrick Lamar, qui s'est amorcée dans une prison pour se terminer au milieu d'un feu et d'une tribu. Le meilleur moment du gala.

Liste des gagnants

Voici la liste partielle des gagnants de la cérémonie des prix Grammy, qui était célébrée lundi soir, à Los Angeles.

- Enregistrement de l'année: Uptown Funk, Mark Ronson et Bruno Mars

- Album de l'année: 1989, Taylor Swift

- Chanson de l'année: Thinking Out Loud, Ed Sheeran et Amy Wadge

- Révélation de l'année: Meghan Trainor

- Album rock: Drones, Muse

- Album alternatif: Sound & Color, Alabama Shakes

- Performance rock: Don't Wanna Fight, Alabama Shakes

- Chanson rock: Don't Wanna Fight, Alabama Shakes

- Album pop vocal: 1989, Taylor Swift

- Performance pop solo: Thinking Out Loud, Ed Sheeran

- Performance pop d'un groupe ou d'un duo: Uptown Funk, Mark Ronson avec Bruno Mars

- Album urbain contemporain: Beauty Behind The Madness, The Weeknd

- Album rap: To Pimp a Butterfly, Kendrick Lamar

- Performance rap: Alright, Kendrick Lamar

- Collaboration rap/chantée: These Walls, Kendrick Lamar avec Bilal, Anna Wise et Thundercat

- Chanson rap: Alright, Kenrick Lamar

- Performance R&B: Earned it (du film Fifty Shades of Grey), The Weeknd

- Chanson R&B: Really Love, D'Angelo et Kendra Foster

- Album R&B: Black Messiah, D'Angelo And The Vanguard

- Chanson country: Girl Crush, Little Big Town

- Album country: Traveller, Chris Stapleton

- Vidéo: Bad Blood, Taylor Swift avec Kendrick Lamar