Engelbert Humperdinck aura 79 ans le mois prochain. Non seulement il donne encore près d'une centaine de concerts par année, dont trois au Québec ces jours-ci, mais il prépare déjà trois autres albums. Conversation avec un artiste qui dure.

Le plus récent album d'Engelbert Humperdinck regroupe sur deux CD une vingtaine de chansons qu'il interprète en duo avec des invités, dont quelques contemporains comme Cliff Richard, Neil Sedaka, Johnny Mathis, Smokey Robinson, Willie Nelson et le vénérable Charles Aznavour.

«Et le grand Gene Simmons du groupe Kiss!», ajoute aussitôt au téléphone celui qui préfère qu'on le décrive comme un chanteur romantique et non pas comme un crooner, parce qu'un crooner, affirme-t-il, n'a pas un registre de trois octaves et demie.

Les albums de duos sont très à la mode depuis des années, mais c'est un peu par hasard qu'Engelbert Humperdinck a décidé d'en faire un. Il regardait un concert d'Elton John qui rappelait qu'à l'époque où il n'était qu'un auteur de chansons sans le sou, il rêvait qu'Engelbert Humperdinck chante l'une de ses compositions.

«Je ne l'avais pas appelé à l'époque, mais je l'ai fait plus récemment pour lui demander s'il me ferait la faveur de chanter sur mon album de duos, raconte Humperdinck. Il a accepté et, à partir du moment où Elton était à bord, tout le monde a embarqué. C'est pour ça que j'ai intitulé mon album Engelbert Calling

Il n'y a pas de duo virtuel avec un chanteur disparu sur Engelbert Calling, mais il pourrait fort bien y en avoir sur son prochain album, qui s'intitulera Engelbert Redialed: «Quand j'ai commencé dans le métier, Nat King Cole était mon chanteur préféré et, bien sûr, je suis devenu un bon ami d'Elvis. J'aimerais beaucoup chanter avec lui parce que je n'en ai jamais eu l'occasion.»

Rendez-vous raté avec Gorillaz

Il y a quelques années, Damon Albarn et le groupe Gorillaz ont fait savoir à l'agent d'Humperdinck qu'ils aimeraient bien que le monsieur chante sur leur album. Quand le principal intéressé a su que son agent avait refusé cette proposition, il a immédiatement viré l'agent en question et a confié sa carrière à son fils Scott.

«Mon agent n'avait aucune idée de qui il s'agissait, dit Humperdinck en riant. J'étais absolument furieux qu'il ait refusé. Mon fils Scott est plus en phase avec ce qui se passe aujourd'hui. C'est lui qui a établi le contact avec tous ces artistes légendaires sur mon album. Il a fait du très bon travail et il va faire encore mieux pour le prochain disque. Je suis convaincu qu'il va communiquer avec eux [Gorillaz].»

Pour se tenir au courant, Humperdinck ne se contente pas d'écouter des disques, il regarde également des émissions comme The Voice: «Quand j'entends une chanson que j'aime, je la vole et l'ajoute à mon spectacle.»

Dans celui qu'il va donner à la salle Wilfrid-Pelletier samedi, il se pourrait bien qu'il reprenne à la façon country I'm On Fire de Bruce Springsteen: «Je baigne dans l'univers country depuis longtemps. Release Me était une chanson country tout comme Am I That Easy To Forget et There Goes My Everything», rappelle celui qui est né Arnold George Dorsey à Madras et qui a regagné l'Angleterre avec ses parents peu avant l'indépendance de l'Inde.

Son répertoire actuel compte également au moins une chanson plus récente, Thinking Out Loud, de son jeune compatriote Ed Sheeran, dont il vante le talent et admire la réussite. «Mais je la chante à ma façon, inimitable», ajoute-t-il.

Avec Cat et Jimi

Sur son album de duos, il reprend également avec son autre fils Bradley une chanson tout indiquée: Father and Son de Cat Stevens. «J'ai travaillé avec Cat quand il n'était pas très connu et qu'il chantait déjà Father and Son, raconte Humperdinck. Nous partagions l'affiche avec les Walker Brothers et Jimi Hendrix. C'était incroyable!»

Scott Walker s'est réincarné depuis en artiste un peu plus champ gauche, preuve ultime que tout peut arriver pourvu que l'on dure. Humperdinck acquiesce. «Je suis resté sous les feux de la rampe depuis assez longtemps et je fais toujours quelque chose d'inhabituel pour que ça demeure intéressant.»

Inhabituel comme son interprétation tout à fait sérieuse de la chanson Lesbian Seagull pour la bande originale de Beavis&Butt - Head Do America, l'irrévérencieux film d'animation de 1996. «J'ai le sens de l'humour et le public qui vient me voir l'apprécie, affirme Humperdinck. Je n'ai jamais pris mon image au sérieux. J'ai compris ça en voyant mon ami Elvis sur scène. Il était très humble.»

S'il se moque volontiers de son image, Engelbert Humperdinck ne l'a jamais négligée pour autant, lui qui se teint les cheveux depuis l'âge de 20 ans.

«Je grisonnais déjà et je ne voulais pas que les gens me croient plus âgé que je ne l'étais. Je n'ai pas honte de dire que je me teins les cheveux. Je ne veux pas qu'on voie en moi une personne âgée, pas tout de suite, en tout cas», dit-il en riant.

Ses célèbres favoris ne sont pas non plus un accident de parcours. Quand il a emprunté son nom d'artiste au compositeur d'opéra allemand Engelbert Humperdinck au milieu des années 60, il s'est fait pousser les cheveux et les favoris pour se distinguer des autres chanteurs: «Par la suite, Elvis et les Beatles ont tous eu des favoris et tout le monde, y compris Glen Campbell et Kenny Rogers, a suivi. J'ai lancé la mode.»

À la salle Maurice-O'Bready de Sherbrooke le 10 avril, à la salle Wilfrid-Pelletier de Montréal le 11 avril et au Capitole de Québec le 12 avril