Boston, Aerosmith, The Pixies, Donna Summer, James Taylor, Joan Baez, Rob Zombie, The Cars, New Kids on the Block, Aimee Mann, Jonathan Richmond, The Mighty Mighty Bosstones, The Lemonheads, Morphine, Extreme, Dick Dale, The Breeders, Juliana Hatfield, Gang Starr, Debo Band, Mutual Benefit.

Voilà pour un demi-siècle de musiciens populaires originaires de Boston. Étonnamment, cette ville n'est pas une pépinière de rock, de pop ni de hip-hop. Pourquoi si peu? Parce que Boston est une ville universitaire où fleurit d'abord la musique sérieuse.

«Pour nombre de musiciens, Boston peut devenir une cellule de détention. Il n'y a pas beaucoup d'espace de liberté dans cette ville qui n'a pas connu l'adversité comme Berlin, Montréal ou Detroit. La jeunesse n'a jamais eu à y reconstruire et à y imposer sa culture. Il est très difficile d'y trouver un loft afin de répéter entre amis, de composer, de créer. Ça coûte très cher!» explique le percussionniste Andrew Barr, Montréalais d'adoption qui a vécu 10 ans à Boston avant de migrer au nord de la frontière américaine.

«Ça n'a rien à voir avec Montréal. Il y règne une atmosphère qu'on ne trouve pas à Boston», renchérit Brad Barr, auteur, compositeur, chanteur et guitariste des Barr Brothers. Originaires de Providence, les frangins s'étaient installés à Boston pour y poursuivre des études de musique. Ils ont ensuite fondé le groupe The Slip et investi le réseau indie. Ce qui les a conduits à déserter Boston.

De grandes écoles

Nous aurons saisi que la plus importante ville universitaire des États-Unis se démarque plutôt par l'excellence de sa musique sérieuse (classique ou jazz) et de ses institutions d'enseignement.

Nombre de grands interprètes de la musique classique y vivent: parmi eux, le pianiste virtuose québécois Marc-André Hamelin, l'altiste Rebecca Hallowell, la violoncelliste Cherry Kim, la soprano Jacqueline Novikov, les violonistes Daniel Broniatowski et Aleksandra Labinska. Le grand compositeur américain John Adams y a vécu avant de s'installer en Californie.

Côté jazz, d'innombrables musiciens y ont étudié ou enseigné, de Pat Metheny à Gary Burton en passant par Steve Lacy, George Russell, Bob Brookmeyer ou Danilo Perez.

Boston peut compter sur des infrastructures de grande qualité comme le Symphony Hall, l'une des meilleures salles de concert du monde. Le pouvoir d'attraction de ses facultés de musique est considérable: New England Conservatory, Berklee College of Music, Boston Conservatory, Brookline Music School, School of Grove, All Newton Music School, Community Music Center of Boston, New School of Music, sans compter les facultés de musique d'universités prestigieuses dont (évidemment) Harvard.

Des pour et des contre

Dans les années 80, le pianiste de jazz François Bourassa avait choisi le New England Conservatory.

«Je venais de terminer mon baccalauréat en composition à l'Université McGill, j'avais décidé de faire la maîtrise en jazz que le NEC offrait alors. J'y ai étudié avec des musiciens éminents comme Tom Mc Kinley, Fred Hersch, George Russell, Miroslav Vitous, Bob Moses, Jimmy Giuffre, Ran Blake et Mick Goodrick. Le trompettiste et compositeur montréalais Joe Sullivan était un de mes confrères, mais aussi le claviériste John Medeski et le contrebassiste Ben Street. J'avais adoré l'ambiance de la ville; on y trouve beaucoup de musiciens et de clubs de jazz, plus qu'à Montréal. Boston est-elle une ville musicale surtout dédiée aux universitaires? Oui.»

Quant à la quête d'un langage singulier...

«Étudier à Boston est une lame à double tranchant si on veut créer de la musique originale. Un musicien qui cherche sa propre voie ne la trouvera pas nécessairement à l'école. Cela dit, il y a beaucoup de grands musiciens qui y enseignent ou viennent y jouer grâce aux institutions de Boston. On peut s'y nourrir de musique classique occidentale, de jazz, de musique classique indienne et plus encore», explique Andrew Barr. À l'instar de son frère Brad, il a été inscrit au Berklee College of Music.

C'est aussi le cas du Québécois Karl Marino, qui vient d'y amorcer un programme d'études.

En 2012, ce guitariste très doué a remporté la compétition Six String Theory, menée par le célèbre guitariste de jazz Lee Ritenour. On lui a remis une bourse qui couvre la totalité de ses droits de scolarité.

«La valeur académique de ce diplôme de premier cycle est moindre que celle de ma maîtrise obtenue récemment à l'Université Laval (en guitare classique, interprétation), mais Berklee m'offre beaucoup d'occasions d'apprentissage: performance jazz, composition de musique de film ou de jeu vidéo, sans compter le réseautage professionnel qui y est précieux», pense Karl Marino, joint à Boston.

«Environ un tiers des étudiants viennent de l'étranger, poursuit-il. C'est culturellement riche et diversifié. Le ratio élèves-prof se situe autour de 7 à 1 et les professeurs sont très généreux de leur temps. De plus, Berklee invite beaucoup d'artistes à venir s'y produire et à y donner des classes de maître. J'y passerai donc quatre ans. C'est long, mais je suis persuadé que mon temps y sera bien utilisé. Je compte y développer une carrière solide.»

Musique toute bostonienne

THE PIXIES

De 1986 à 1993, The Pixies fut l'un des groupes les plus influents du rock dit « alternatif ». Ses mélanges bien dosés de punk rock, space rock, noise rock, surf rock et rock psychédélique ont fait école, pour ainsi devancer les vagues grunge et indie qui devaient suivre. Le chanteur Black Francis, le guitariste Joey Santiago et le batteur David Lovering ont repris (sporadiquement) du service depuis 2004, la cofondatrice Kim Deal a aussi fait de même, mais avec le groupe The Breeders qu'elle avait joint après l'aventure Pixies.

AEROSMITH

Aerosmith est assurément le groupe de hard rock le plus célèbre à provenir de Boston. Formée autour du chanteur Steven Tyler et du guitariste Joe Perry, cette fameuse brigade a une quinzaine d'albums studio à son actif - de 1973 à 2012. On a jadis qualifié Aerosmith de Led Zeppelin américain, mais l'étiquette a disparu depuis un long moment déjà. À l'évidence, ce supergroupe a son identité propre, son pouvoir d'attraction et sa propre contribution à l'histoire du rock.

THE LEMONHEADS

Fondé en 1986 par les auteurs-compositeurs Evan Dando (photo) et Ben Deily, ainsi que par le guitariste Jesse Peretz, The Lemonheads est l'un des groupes américains les plus marquants de l'ère rock alternatif. À l'instar de plusieurs formations devenues populaires au tournant des années 90, The Lemonheads a pris une longue pause de 1998 à 2005. De la formation initiale, Evan Dando et Ben Deily sont toujours là, mais ils peuvent compter sur des collaborateurs prestigieux tels Juliana Hatfield et Ryan Adams.

MUTUAL BENEFIT

« Je flotte, donc je suis. » Telle pourrait être la devise de Jordan Lee, autour duquel des bardes contemporains créent une pop de chambre très douce, très riche et très enveloppante. Le projet est né à Austin (Texas) vers 2009, après quoi le fondateur a déménagé ses pénates à Boston où il a recruté les musiciens de l'actuelle formation. En 2013, l'album Love's Crushing Diamond de Mutual Benefit a récolté d'excellentes critiques, ce qui a justifié la venue du groupe au récent Pop Montréal.

DEBO BAND

Aux États-Unis, Debo Band est au groove éthiopien ce qu'Antibalas est à l'afrobeat nigérian. Sa direction est assurée par le saxophoniste et compositeur Danny Mekonnen, titulaire d'un doctorat en ethnomusicologie à Harvard, et peut compter sur l'ascendant du chanteur Bruck Tesfaye. À ces deux artistes d'origine éthiopienne se joignent des Américains d'origines diverses, ce qui a pour effet d'hybrider cette musique populaire aux fondements africains de l'Est.

Photo Archives Le Soleil

The Pixies