Retraité de la scène, le chanteur français Eddy Mitchell continue à s'amuser sur disque avec Héros, un album country-soul tout en délicatesse, publié lundi.

Il y a deux ans, «Schmoll» avait fait ses adieux à la scène lors d'une dernière séance pleine d'émotion dans la salle parisienne de l'Olympia, à deux pas du mythique Golf Drouot où il avait débuté dans les années 60.

Après 50 ans de carrière, Eddy Mitchell estimait qu'il était temps de tirer sa révérence, affirmant «ne pas avoir envie d'arriver sur scène avec une canne». «Une question d'image et de politesse envers le public», disait-il.

Mais, à l'époque déjà, il avait tenu à rassurer ses fans en précisant qu'il comptait bien continuer à enregistrer des disques.

C'est chose faite cet automne avec Héros, son 35e album studio, marqué par son plaisir évident de chanter un répertoire qui lui colle à la peau.

Enfant de Belleville, Claude Moine (son vrai nom) a grandi en rêvant de Nashville. Au cinéma, où son père l'emmenait souvent, il a découvert l'Amérique des cowboys avant de s'initier à celle du rock au Golf-Drouot près d'une banque où il était coursier.

«Au départ, je voulais intituler ce disque Country soul. Un titre explicite un peu facile... Alors, ça s'appelle finalement Héros en hommage aux musiciens qui jouent sur l'album. Ce sont tous des pointures du genre, de véritables légendes», explique le chanteur.

Enregistré entre Paris et Los Angeles, Héros réunis tous les ingrédients des musiques afro-américaines qu'il affectionne: pedal steel et vibraphone, cuivres et cordes.... Le guitariste Steve Cropper, compagnon d'Ottis Redding, côtoie Charlie McCoy, harmoniciste de Dylan ou le claviériste soul Booker T Jones.

Tous sont présentés en clôture de l'album par un Jean Dujardin cabotin.

Retour au théâtre

Si les musiques, majoritairement composées par le fidèle Pierre Papadiamandis, sont résolument ancrées dans l'imaginaire américain, les paroles d'Eddy Mitchell balayent un large spectre.

En écho à la crise, le chanteur évoque pudiquement les fins de mois difficiles (Le goût des larmes), se moque d'un escroc patenté, grande gueule et mythomane sur le rock Je veux qu'on m'aime et rend hommage à l'homme de la rue (Les vrais héros).

«Quand on voit qu'il y a des gens qui mettent plus de deux heures pour aller au boulot et autant pour en revenir, on se dit que c'est ça le vrai héroïsme», dit le chanteur.

L'auteur de Couleur menthe à l'eau parle tendrement de l'enfance sur Premier printemps, qui s'achève sur un optimiste «vieillir est vraiment un jeu d'enfant». Il chante la naïveté perdue des adultes dans La cour des grands.

Le cinéphile fait un clin d'oeil à Alfred Hitchcock (Final Cut), le parolier à Ferré (Léo, un texte écrit par sa femme Muriel).

L'amoureux des États-Unis adapte Ottis Redding (Pour tuer le temps, Happy Song en VO), et Hank Williams (I'm so lonesome I could cry qui devient T'es tout seul, tu stresses, t'es mal).

Avec Nolwenn Leroy, il reprend en duo la Complainte du phoque en Alaska popularisée dans les années 70 par les Québécois de Beau Dommage.

Et si Eddy Mitchell a abandonné la scène, il ne déserte pas les planches pour autant.

En janvier, il jouera au théâtre pour la première fois depuis 2008. Le comédien bourru reprendra le rôle tenu par Jean Gabin dans une adaptation d'Un singe en hiver, mise en scène par Stépahe Hillel au Théâtre de Paris.