Ils étaient 1500 et ils ont chanté, crié plutôt, Maudit bordel!, entraînés par Marie-Chantal Toupin qui a lancé: «Des tragédies comme ça, on peut les prévenir et on n'en veut plus!» On prend la terre pour une poubelle, maudit bordel!

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Quarante-trois chanteuses et chanteurs, des artistes de la zone émergente pour la plupart, ont participé hier à Lavaltrie à un chaleureux concert de solidarité pour la population de Lac-Mégantic, éprouvée par la tragédie que l'on sait. «On aide à reconstruire une vie et une ville», a encore dit Mme Toupin, qui a terminé son cours secondaire à Lac-Mégantic.

Peu d'autres artistes ont fait directement allusion à ces tristes événements, à l'exception de ceux qui, comme Marie-Mai, ont été touchés personnellement par la perte d'un proche. «Je connaissais Guy Bolduc qui chantait au Musi-Café ce soir-là», a raconté Marie-Mai à La Presse avant le concert. «Guy était un ami de Fred (St-Gelais), mon mari, mais même sans ce lien personnel, j'aurais été ici ce soir parce qu'il faut, chacun à sa manière, soutenir ces gens qui souffrent.»

Marie-Mai en tête d'affiche

Première à monter sur la belle scène Desjardins plantée à 25 pieds du fleuve, Marie-Mai, le plus gros «nom» de l'affiche, a chanté Comme avant et, dédié à l'ami disparu, With or without you de U2. Devant elle, des fans de la première heure qui avaient fait la file depuis 7h pour être les premières devant la scène où leur idole, comme dans un monde à l'envers, a été la première à chanter. Elles ont 20 ans et suivent Marie-Mai depuis son triomphe à Star Académie en... 2003. Elles ont la signature de la chanteuse ou le sigle de sa tournée tatoué sur le poignet ou le haut de la cuisse. Elles sont une dizaine, de Châteauguay, de Saint-Hubert ou de Repentigny: elles sont «la tribu M.M.» et hier, elles ont un peu mené le bal dans le magnifique parc riverain Gérard-Lavallée de Lavaltrie, ville de Lanaudière nommée en l'honneur du premier seigneur de l'endroit, un soldat du régiment Carignan-Salières.

Dans une soirée tout acoustique - trois heures et demie de chansons - où toutes les performances étaient égales dans l'esprit de partage qui l'animait, La Presse se souviendra néanmoins de la forte présence scénique de Charlotte Cardin-Goyer (qui faisait partie de l'équipe Marie-Mai à l'émission La Voix), de la voix vibrante d'Émily Bégin qui a livré un superbe duo (Si longtemps) avec le guitariste et chanteur Bruno Labrie. Même le Saint-Laurent a frissonné...

À guichets fermés

À 8h hier, il restait 500 billets... et «à midi, la place était sold-out», se réjouissait pour sa part le producteur-promoteur joliétain Simon Robitaille. La soirée de solidarité - «Lavaltic» ou «Mégantrie» - a donc été présentée à guichets fermés, avec 1500 billets vendus 35$ chacun. «Les commandites couvrent le coût du spectacle», nous a pour sa part expliqué le coproducteur Jean-Sébastien Martin, du café La Chasse-Galerie. «On est donc en mesure de remettre la totalité des revenus aux organismes de secours de Lac-Mégantic, soit 52 250$ divisés également entre la Croix-Rouge et le Fonds Avenir Lac-Mégantic.» Jean-Claude Gravel, maire de Lavaltrie, a annoncé par ailleurs que la ville lanaudoise ajouterait 3000$ à ce montant.

Avec ce nouvel apport au fonds d'aide à Mégantic, la Croix-Rouge approche les 7 millions de dollars, a précisé à La Presse Manon Thibault, responsable du financement à la Croix-Rouge Québec. «Merveilleuse soirée!», a déclaré en souriant cette dame qui travaille fort ces temps-ci.

Le chanteur David Jalbert, de Mascouche, avait lui aussi une raison personnelle de chanter à Lavaltrie hier: «Pour moi, la solidarité est le salut de l'être humain. On pourrait penser que c'était plus fort avant parce que nos parents et grands-parents étaient pauvres. On voit la preuve du contraire. Moi, j'ai joué au Musi-Café de Lac-Mégantic l'année passée et j'ai perdu des amis dans cette catastrophe. On ne peut pas décrire la peine des survivants, mais ce que je vois ici ce soir, ça m'encourage. Comme le chantait Plume: «C'est quand ça va mal que ça va bien».»

Dans la légende, la chasse-galerie avait atterri à Lavaltrie, où les lumberjacks de l'Outaouais allaient voir leurs blondes. Hier, dans la pleine lune, on a vu le canot volant repartir vers Mégantic, plein d'espoir et de compassion pour ceux qui en ont grand besoin.