Les Trois Accords ont changé d'agent et de maison de disques et accouché d'un quatrième album vachement romantique, qu'ils lancent aujourd'hui même: J'aime ta grand-mère. Rencontre avec un groupe dont le but premier n'est pas de faire rire, mais d'étonner.

Il est à peine 9h en ce lundi matin et les quatre Trois Accords sont attablés dans les locaux de La Tribu, leur nouvelle compagnie de disques, pour la première d'une série d'interviews sur leur quatrième album, J'aime ta grand-mère. À l'approche du lancement officiel à La Tulipe, ce soir à 18h, auquel sont conviés tous leurs fans et leurs grands-mères, les ambassadeurs par excellence de Drummondville ont ce petit air de collégiens complices qu'on leur a toujours connu, mais c'est avec le plus grand sérieux qu'ils constatent que leur nouvelle cuvée est empreinte de romantisme.

Romantisme transgénérationnel et juste un peu décalé dans la chanson-titre ou dans Sur le bord du lac, dans laquelle le protagoniste est en amour avec la mère de son meilleur ami. Romantisme clandestin dans Les amoureux qui s'aiment dont les ébats nocturnes ont lieu sur un terrain de golf. Mais romantisme tout de même.

Depuis la «sérieuse» Le bureau du médecin de leur album précédent (Dans mon corps, 2009), expliquent-ils, leur public leur a donné le feu vert pour traiter de sujets pas nécessairement rigolos. «Et aujourd'hui de faire des tounes d'amour un peu moins cyniques, un peu plus directes, ça peut également être surprenant pour ceux qui nous connaissent, dit le parolier, chanteur et guitariste Simon Proulx. On n'avait jamais mis le mot amour dans une chanson auparavant tandis que là, il est dans le titre de l'album. J'aime ta grand-mère oui ça va très loin, mais ça reste une déclaration d'amour.»

Sur le bord du lac, Simon l'a écrite exprès pour Renée Martel avec qui il voulait la chanter. «Je la trouve belle», dit-il. «Et c'est un joyau de Drummondville», renchérit le guitariste Alexandre Parr. Simon reprend: «Je trouve que cette femme-là, avec la vie et la carrière qu'elle a eues, ajoute de la profondeur à une toune. Je ne sais pas pourquoi, mais c'était pour elle cette photo d'une histoire d'amour de deux personnes en escapade.»

La pochette du nouvel album montre une belle grand-maman posant au poste de police, imitée en cela par les quatre gars à l'intérieur du livret. Détournement de mineurs? de majeure? Peu importe, les Trois Accords ont trouvé l'idée «cool». «Dans l'album, tu ne sais jamais si les personnages sont responsables ou pas de ce qu'ils ont fait, criminellement ou psychologiquement», fait remarquer le batteur Charles Dubreuil.

Le thème de la folie revient dans les trois dernières chansons: C'était magique qui reprend là où avait laissé Nuit de la poésie de l'album précédent; Je me touche dans le parc dans laquelle l'exhibitionniste en question ne vise qu'à retrouver sa femme internée; et Retour à l'institut, une chanson douce-amère irrésistible dont les Trois Accords ont toujours eu le secret.

«Le thème de la folie a souvent été abordé dans tous nos albums. Ce sont souvent des gens pas normaux ou des gens normaux qui vivent un épisode bizarre», rappelle Simon qui dit s'être inspiré d'une conversation avec un membre de sa famille qui a travaillé à l'Institut Philippe-Pinel.

Comme pour Dans mon corps, les Trois Accords ont travaillé avec le réalisateur Gus Van Go, dans son studio de Brooklyn. Contrairement à la plupart des groupes qui soumettent plusieurs chansons à un réalisateur et comptent sur lui pour faire le ménage, les Trois Accords lui sont arrivés avec les 10 titres qui allaient aboutir sur l'album. Pourquoi confier à un tiers le travail de réalisation qu'ils pourraient faire eux-mêmes? «Des fois, on pense tous pareil, mais on peut aussi tous aller dans des directions différentes et il n'y aura personne pour trancher. Ça nous prend un coach», explique le bassiste Pierre-Luc Boisvert.

Si certaines de ces nouvelles chansons ont une saveur rétro (Personne préférée, J'aime ta grand-mère et Son visage était parfait, à l'ambiance «Capri» commente Simon le crooner), c'est aussi un peu à cause de Gus Van Go explique Alexandre: «Dans son studio, à part les ordis, il n'y a pas un instrument qui date d'après 1967. Ça finit par sonner comme ça.»

Les Trois Accords vont repartir en tournée en janvier 2013 et leurs fans montréalais les reverront au National, les 2, 3 et 4 mai. Ils seront également du gala de l'ADISQ dimanche soir, mais pas question de révéler ce qu'ils y joueront. «C'est une toune que tout le monde connaît, glisse Charles. On ne peut pas en parler. On aimerait ça, mais on se retient.»

Les Trois Accords, J'aime ta grand-mère, La Tribu/Dep

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Toujours étonner

Quel thème les Trois Accords devraient-ils aborder dans leur prochain album pour continuer d'étonner leurs fans? Nous leur avons posé la question.

«L'amour en solo, peut-être?» - Pierre-Luc

«La disparition totale du fax, remplacé par le PDF.» - Alexandre

«Moi je me sers beaucoup du fax. Ça va être mon thème: le PDF qui tente d'expliquer au fax qu'il a autant de légitimité que lui. Et les deux qui s'obstinent.» - Charles

«J'essaie de trouver ce qui pourrait compléter avec eux un triangle amoureux. La photocopieuse? On en a déjà parlé dans une chanson, mais peut-être qu'elle pourrait effectuer un retour?» - Simon