Depuis la sortie de son album Brun, Bernard Adamus a donné près de 200 spectacles. Pour reprendre ses mots, il a eu «le malheur de faire pas mal d'affaires avec son petit disque». Ses trophées n'ont rien changé à sa musique brute et naturelle, mais son succès lui a mis de la pression pour son No2, en magasin mardi. Surtout qu'Adamus y dévoile des textes plus tourmentés.

Bernard Adamus ne cache pas que l'enregistrement de No2 s'est fait sous grande pression. «J'étais bien plus nerveux. Cela n'a aucune commune mesure avec le premier album, lance-t-il. Pour Brun, on s'en foutait, on ne pensait à rien.»

L'auteur-compositeur est entré en studio avec la même intégrité, mais avec un tout autre CV. Comme dirait le principal intéressé, «Monsieur Bernard Adamus a eu le malheur de faire pas mal d'affaires avec son petit disque». «Il y a eu des bons moments dans cet enregistrement-là, mais on ne se le cachera pas: il y avait des budgets et des deadlines

En studio, Adamus a refait équipe avec le réalisateur Éric Villeneuve dans le luxe du fameux Wild Studio de Saint-Zénon. Leur souci d'authenticité s'est traduit par un perfectionnisme de «maniaque mental». «On s'est battu contre le mix comme ça se peut pas, raconte Adamus. On a pris un studio qui a coûté des milliers de dollars, et je ne trouve pas qu'avec la musique naturelle que je fais, j'ai besoin de micros à 20 000 piasses [...] C'était concluant mentalement d'être enfermé loin de Montréal, mais au niveau du son, il y a des choses que je ne comprends pas encore dans le mix.»

Adamus avait une peur bleue que le son soit sourd. À l'écoute de No2, il n'en est rien. Ce sont plutôt les tourments, le désir et les sentiments exprimés sans aucune pudeur qui frappent. Adamus parle «des chemins du doute», de «son coeur à l'envers». Dans Les Obliques, Adamus s'en veut d'être en retard, de se lever tard. Avec une mélodie sensible et un doux trombone berçant, la pièce Le scotch goûte le vent est à nouer la gorge.

«Je ne sais pas si l'album est trop personnel, indique Adamus. Je me raconte beaucoup, plus que dans l'autre. J'ai hâte de voir ce que les gens vont en penser [...] Je sais que ce n'est pas très rose, ce que je raconte sur certaines chansons. Mais je suis content des images et des phrases dépouillées... Ça fait drôle de chanter ça devant du monde. C'est bizarre, mais qu'est-ce que tu veux que je fasse? C'est un beau défi. Il faut bien se péter la gueule un peu. Sinon, ça devient plate!»

En entrevue comme en chanson, Adamus est vrai. Peut-on le lui reprocher? «Il n'y a rien à regretter dans les tounes, mais dans ce que je fais dans la vie», dit le principal intéressé.

«Ploguer des affaires»

Dans No2, on suit Adamus dans ses soirées de doute, mais aussi dans ses virées festives. Le piano ragtime donne un souffle entraînant à Entre ici pis chez vous, alors que ses amies de Canailles l'accompagnent sur Arrange-toi avec ça.

«Il y avait une couple d'affaires que je voulais essayer. J'étais tanné d'être juste 100% acoustique, indique Adamus. J'aurais aimé essayer plus d'affaires électriques. Mais se ploguer pour se ploguer, c'est pas toujours pertinent.»

En spectacle, Adamus annonce «un son différent», avec Jérôme Dupuis-Cloutier au saxophone ou au clavier, Renaud Gratton ou Benoît Paradis au trombone et Sylvain Deslisle qui passe de la contrebasse à la batterie.

Pour Adamus, la tournée est un privilège. Et tant mieux si le succès et la pression viennent avec. «Je vis ça comme une bande dessinée, lance-t-il. Je ne sais pas, moi, ce que je fais là quand je vais à Pénélope McQuade avec du make-up dans la face. On est rendus là... Mais tout ça est positif: vaut mieux que le monde en parle que le monde n'en parle pas. C'est un beau problème à gérer.»