On rapporte que le projet de la veille signé John Zorn, inspiré d'un roman de feu William S. Burroughs, s'est avéré plus dense, plus proche de la forme jazzistique. Et d'autant plus excellent si l'on se fie à l'album qui porte le nom de ce roman : Nova Express. Vendredi, le Colisée des Bois-Francs s'est rempli de nouveau pour un second concert sous la gouverne de John Zorn en autant de soirs au Festival international de musique actuelle de Victoriaville.

Au quartette formé de John Medeski au piano, Trevor Dunn à la contrebasse, Ken Wolleson au vibraphone, Joey Baron à la batterie, tous participants au projet Nova Express, nous avons eu droit à un épisode de musique de chambre zornifiée, avec l'ajout du violoniste Mark Feldman et du violoncelliste Erik Friedlander.

La musique au programme n'était pas sans rappeler l'épisode Bar Kokhba pour cordes, un ensemble créé par Zorn au milieu des années 90 dans la même mouvance que le fameux quartette Masada. Nous voilà en 2012 et... cette approche n'a pas foncièrement changé sauf les modifications de l'instrumentation et d'un partie du personnel sauf ses composantes cruciales : Feldman, qui a pris du galon côté impro et Friedlander, dont le jeu pizzicato au violoncelle s'apparente à celui de la contrebasse jazz.

L'utilisation du vibraphone rappelle également les Dreamers de Zorn (qui explorent des zones plus carlos-santanesques et plus lounge), mais dans un cadre exclusivement acoustique exploitant les mêmes références : musiques sémites, musiques afro-latines, musique de chambre classique, jazz moderne de type «third stream» ou jazz contemporain. Le compositeur et saxophoniste (qui se limitait à diriger les opérations vendredi)  exploite ces matériaux depuis des lustres, rien de neuf sous les étoiles de vendredi.

Pour les zornophiles, il eut été plus instructif de découvrir le plus récent projet de Zorn, soit l'album Nosferatu (sous étiquette Tzadik) qui réunit Bill Laswell (basse), Rob Burger (piano, orgue), Kevin Norton (vibraphone et batterie) et Zorn (sax alto, électronique, claviers, etc.). The Concealed , titre du concept ici suggéré, fut une expérience fort agréable au demeurant. Très belle cohésion, direction dynamique et alerte, et l'occasion de découvrir le jeu très personnel d'un John Medeski au piano - hormis les cordes de Feldman et Friedlander.

Le projet théorique de The Concealed préconisait  une interaction entre une quinzaine de compositions de Zorn, chacune liée à une image et un texte de l'artiste David Chaim Smith. Franchement, la projection de ces images et ces textes n'a permis ni contemplation ni interaction avec la musique. En toute hilarité, cependant, on retiendra la dernière phrase projetée derrière le groupe de ce génial compositeur juif from New York, triomphant au rappel : « In the world that is coming, pig will be kosher. »

Le Festival international de musique actuelle de Victoriaville se poursuit samedi et dimanche. Pour infos : https://fimav.qc.ca/edition/programmation/