Le treizième Elektra est déjà en marche. Comme avant, ce festival international consacré aux arts numériques mise essentiellement sur la création audiovisuelle et l'utilisation de la robotique pour la performance devant public.

«Le changement majeur cette année, c'est la séparation entre le volet installation et le volet performance. La Biennale internationale d'art numérique a désormais sa propre structure et son propre événement axé sur les installations et l'art public - en marche depuis le 18 avril au Musée des Beaux-Arts, les activités se poursuivent jusqu'au 13 juin. À travers tout ça, Elektra demeure annuel et axé sur la performance», explique Alain Thibault, directeur artistique des deux événements produits par l'ACREQ - Association pour la création et la recherche électroacoustiques du Québec.

«Notre gros coup sera présenté dans le cadre des Vendredis Nocturnes du Musée d'art contemporain: Carsten Nicolai, alias alva noto, dont la performance univrs (uniscope version) coïncide avec l'installation présentée au MAC. Cette oeuvre est rythmée façon «carrure allemande», l'image y est intimement liée au son. Oui, le cofondateur du label berlinois raster-noton s'est produit  à Elektra en 2009. Cette fois, il a fait usage du logiciel TouchDesigner créé par Derivative, firme torontoise qui a d'ailleurs fourni le logiciel nécessaire à la création du récent spectacle d'Amon Tobin. Dans le cas de ce dernier, c'était de la projection en trois dimensions alors qu'il s'agit ici de 2D projeté sur trois écrans. Très original, super beau», assure le directeur artistique d'Elektra.

L'autre gros coup de la semaine, estime-t-il, c'est le collectif montréalais Projet EVA qui présente Cinétose, performance robotique signée Simon Laroche et Étienne Grenier: «On l'avait fait six fois l'automne dernier dans le cadre de notre événement Elektra Lab. Ça a tellement bien marché qu'on le refait en mai. Pas moins de 36 plaques de métal y sont actionnées par un système informatique, plaques sur lesquelles des marteaux créent un effet de la percussion. Ça devient un grand gamelan industriel qui bouge verticalement et qui génère de la musique. Éclairage, performance intéressante qui joue sur l'oppression du public, l'impression d'être coincé entre le plancher et le plafond. C'est assez puissant. On ne peut y admettre que 100 personnes par représentation, ce pourquoi on présente la performance jeudi, vendredi et samedi.»

Jeudi, par ailleurs, la première soirée à l'Usine C, où se tient Elektra depuis plusieurs années, offre aux festivaliers une sélection surtout québécoise de créations audiovisuelles; Jean Piché, Yan Breuleux, Szkieve + TIND et Mihai Grecu y suggéreront tour à tour leur travail. Toujours à l'Usine C, la soirée de clôture  prévoit une «sélection internationale relevée avec trois performances au programme.» Ainsi, SCHNITT (IT), un duo de Milan, y présentera l'oeuvre Synchropath, qui se fonde sur le traitement de 678 fichiers audio et 234 fichiers vidéo. Puis le duo incite / de Hambourg y procédera à une immersion audiovisuelle: Zoom Studies. Enfin, la pièce Sirens sera offerte de concert par le compositeur grec Novi_sad (Thanasis Krapoulias) et le Japonais Ryoichi Kurokawa; on y exploitera l'idée de l'intensification de l'information audiovisuelle en opposition avec le déclin économique observé ces dernières années.

Pour les mélomanes plus rapides sur la gâchette, la Sala Rossa accueille ce mardi Novi_sad, Félix-Antoine Morin et Meat Parade à compter de 20h dans le cadre d'Elektra.

«L'idée, conclut Alain Thibailt, est de ne pas s'asseoir sur ses lauriers. Dès que ça devient confortable, il faut que ça bouge. Alors? Les arts numériques ayant atteint une maturité, il leur fallait une plateforme autonome qui nous a permis de raffermir notre réseau, notamment en travaillant avec les deux grands musées montréalais. Quant à Elektra, ce festival continue de représenter un défi car il nous faut rester à l'affût des meilleures performances audiovisuelles ou robotiques. Et les présenter ces productions dans les meilleures conditions possibles... même si nous n'avons pas les moyens financiers pour mettre en oeuvre certains dispositifs immersifs observés en Europe.»