L'industrie du disque souffre, mais l'industrie de la musique traverse une période de bouillonnement intense, comme on a pu le constater jeudi aux Rencontres de l'ADISQ.

Services de diffusion en ligne, applications musicales utiles ou farfelues, l'ère numérique demeure un casse-tête pour les producteurs et ayants droit à la recherche d'un modèle d'affaires viable, mais s'avère un extraordinaire magasin de bonbons pour les amateurs de musique.

Le défi, comme la souligné dans son mot d'ouverture la directrice générale de l'ADISQ, Solange Drouin, n'est pas tant de faire vivre la musique, mais «de vivre de la musique».

L'économie basée sur la vente d'albums physiques s'étant écroulée, les producteurs de musique doivent trouver d'autres sources de revenus.

D'où l'intérêt porté hier aux services de diffusion de musique en ligne (streaming) par abonnement.

Avec le lancement, mercredi, de Zik.ca, plateforme de streaming développée par Quebecor, il était approprié que la journée s'amorce sur cette technologie que ses représentants ont présentée comme une future source de revenus pour les ayants droit.

Zik.ca, comme Rdio et Spotify, permet à ses souscripteurs de piocher dans des discothèques de 12 à 15 millions de chansons depuis son ordinateur à compter de 4,99 $ (9,99 $ pour les appareils mobiles) par mois.

L'offre est alléchante pour l'amateur de musique.

«Peut-être que ça va inciter les jeunes à moins se tourner vers le piratage parce qu'ils auront accès à un catalogue attirant», juge d'ailleurs Nathalie Gagné, gestionnaire de projet chez Vega Musique (Elisapie Isaac, Beast, Jorane, etc.).

Steve Savoca, représentant de Spotify, qui n'est pas encore offert au Canada, va plus loin et affirme que ce type de service «aide à remplacer (les revenus) qui ont été perdus» avec le piratage.

Les défenseurs des services de streaming estiment que le marché est mûr : la vitesse des réseaux sans fil est amplement suffisante et les téléphones intelligents ne sont plus des produits de niches. Sans compter le succès grandissant des tablettes électroniques.

«Pour la première fois dans l'histoire, il y a une explosion d'appareils qui peuvent jouer de la musique», a souligné Carter Adamson, cofondateur de Rdio. Des appareils branchés sur l'internet.

Ce progrès technologique a réglé le détail crucial pour permettre l'envol des services de musique en ligne: l'accès rapide, partout, en tout temps.

«L'esprit de Zik.ca, c'est d'offrir le maximum de possibilités sur les appareils mobiles», a d'ailleurs souligné Pierre Marchand, qui préside le secteur musique du Groupe Archambault.

Payants pour les créateurs?

L'attrait que peut exercer ce genre de service sur les amateurs de musique semble évident.

Or, sa capacité à contribuer aux revenus de l'industrie de la musique, en particulier de la musique québécoise, l'est beaucoup moins.

«On parle de fraction de sous par clic », précise Nathalie Gagné.

«C'est sûr que ce ne sera pas une source de revenus, même à moyen terme, pour faire vivre les producteurs et les artistes », précise quant à elle Lyette Bouchard, directrice générale de la SOPROQ, une importante société de gestion de droits d'auteurs.

Elle parle néanmoins de ces innovations comme de «belles opportunités».

La mise en valeur du répertoire musical local est une autre source de préoccupation pour les producteurs ou les ayants droit face à ces discothèques comptant des millions de titres des quatre coins du monde.

«Quelle sera la place des disques québécois là-dedans?» s'interroge Lyette Bouchard.

L'internet, contrairement à la radiodiffusion, n'est pas régulé. Pas de quota de contenu canadien, ni de contenu francophone donc.

Pierre Marchand a fait valoir la sensibilité locale et l'enracinement au Québec de Zik.ca, qui a le même propriétaire qu'Archambault, Musicor et le distributeur Sélect.

Spotify et Rdio ont toutes deux souligné la nécessité d'un ancrage local et leur volonté d'offrir de la musique québécoise.