Renée Martel a un amour qui a voulu mourir. Mais elle est passée au travers. Et aujourd'hui, elle peut en parler... librement.

Il y en a que la vie n'a pas épargnés. Parlez-en à Renée Martel, qui a passé la sienne à naviguer entre les deuils, les ruptures, les problèmes d'alcool, les accidents et la maladie.

D'autres auraient jeté l'éponge. Mais pas elle. Après une décennie à être complètement hors circuit, la grande dame du country québécois a refait surface en 2009 avec L'Héritage, qui lui vaudra le Félix country de l'année.

On pensait, vu sa fragilité, que ce retour serait passager. Mais non. Mme Martel a bel et bien repris le collier. Nouvel album en main (Une femme libre, lancé cette semaine), elle parle même déjà de son prochain tour de chant.

Comme son disque précédent, Une femme libre, jouit d'un casting de luxe. Les Robert Charlebois et Richard Desjardins ont seulement été remplacés par Pierre Flynn, Daniel Lavoie, Lynda Lemay, Richard Séguin, Paul Daraîche ou Mario Peluso, qui contribuent soit à la plume, soit à la voix, soit les deux en même temps.

Mme Martel a pris le temps de bien choisir les (nombreuses) chansons qu'on lui avait soumises. «Je voulais celles qui m'allaient comme un gant», dit-elle. Elle n'a passé qu'une seule commande - à Lynda Lemay - pour une chanson sur la mort de son chum (La porte de ta vie), qui s'est enlevé la vie en 2008. Sujet hautement délicat, qui demandait une approche hautement délicate. «Il n'y a que Lynda qui pouvait m'écrire un texte sur ça, explique la chanteuse. Elle a le don de se mettre dans la peau des gens comme si c'est elle qui avait vécu les choses.»

Trois ans plus tard, Renée Martel chante cette tragédie et en parle ouvertement. Mais le chemin fut long. Et souffrant. Sans aide extérieure, dit-elle, pas sûr qu'elle s'en serait sortie. «J'aurais pu en mourir. J'ai été obligée de demander de l'aide spécialisée... Je me suis sentie coupable. J'étais en colère. J'étais en détresse. J'ai essayé de comprendre. Puis, j'ai arrêté d'essayer de comprendre. Mais j'ai travaillé fort... Je n'accepterai jamais. Mais disons que j'ai accepté de vivre avec.»

Renée Martel assure être sortie grandie de cette période difficile. Elle en a profité pour chasser ses propres démons et se débarrasser des «boulets» qui l'alourdissaient depuis trop longtemps. «J'ai fait le ménage», dit-elle. Ménage de quoi, au juste? Des mauvais choix de vie, des erreurs professionnelles, des hommes qu'elle n'aurait pas dû quitter, de ceux qu'elle n'aurait pas dû fréquenter. Bref, Renée Martel s'est délestée de ses regrets et a fait la paix avec elle-même. «J'ai payé le prix. Maintenant, j'assume toutes les décisions que j'ai prises.»

Voilà pourquoi la chanteuse se présente aujourd'hui comme une «femme libre». Et voilà pourquoi elle a choisi la chanson de Nelson Minville comme titre pour son album. Bon. Elle admet que le concept est un peu cliché. Mais il se trouve que cela représente assez bien son état d'esprit actuel. Alors, tant pis, lance-t-elle, «c'est exactement cela que j'avais envie de dire».

Libre dans sa tête... mais dans son corps? Ça, c'est une autre histoire. L'été dernier, Mme Martel s'est fait une double fracture, qui lui a valu des plaques et des vis dans le pied... et un déambulateur pour marcher. Elle a passé quatre mois à guérir et utilise encore une canne pour se déplacer, «par prudence». Cet accident, faut-il préciser, s'est rajouté à tous les problèmes de santé qui l'ont affligée dans les 10 dernières années, incluant l'ablation d'un demi-poumon, qui lui a laissé le souffle court et l'a forcée à revoir sa façon de chanter.

Alors oui, elle est un peu diminuée. Mais ce n'est pas ce qui va l'empêcher de chanter. À bientôt 65 ans, Renée Martel a décidé d'aller jusqu'au bout. «De toute façon, chanter, c'est tout ce que je sais faire», dit celle qui fêtera ses 60 ans de carrière l'été prochain. C'est d'ailleurs confirmé: les FrancoFolies célébreront cet anniversaire en juin par un spectacle-événement présenté au Théâtre Maisonneuve. Pour celle qui a toujours évité de faire ses premières à Montréal, voilà qui constitue un immense précédent. Parmi les autres projets en cours, mentionnons que la chanteuse fera bientôt l'objet d'un livre signé par la journaliste Danielle Laurin (Le Devoir, Elle Québec) et d'un documentaire de la cinéaste Stéphanie Lanthier (les Fros), dont le tournage est déjà entamé. «C'est drôle, conclut Mme Martel. Avant, j'avais l'impression d'avoir fait le tour de mon métier. Et là, je fais un tas de choses que je n'aurais jamais pensé faire!»

Une femme libre, de Renée Martel. Musicor.

Une femme libre, de Renée Martel.