Artiste associé au label Ninja Tune sous le pseudonyme Bonobo, Simon Green est un habitué de notre île. Ses passages récents remontent à l'été 2010. Accueilli par le Festival international de jazz, il s'y était produit dans le cadre des célébrations du vingtième anniversaire du label anglais qui, on le sait, avait préféré Montréal afin d'y installer un bureau de ce côté de l'Atlantique. Ses DJ sets ne sont pas non plus piqués des vers, celui du Meg Boat en juillet 2010 fut tout simplement mémorable.

Alors? Quiconque se pointera au Belmont dans la nuit de vendredi à samedi devrait en avoir pour son argent.

«En formule DJ, annonce-t-il d'entrée de jeu, je puise à moitié dans mon matériel et à moitié dans celui des autres. C'est davantage un party. Beaucoup de bass music au programme.»

L'approche de cet Anglais natif de Brighton et transplanté à Brooklyn pour une période indéterminée peut se comparer jusqu'à un certain point à celle d'un Matthew Herbert ou de son aîné, Gilles Peterson. Épris de groove, de soul, de jazz et pourtant associé à la scène électro, il préconise autant les engins numériques que la musique instrumentale jouée en temps réel.

«Adolescent, relate-t-il, j'étais guitariste dans un groupe punk, mais j'ai appris seul à jouer un maximum d'instruments. En fait, je n'étais pas parti pour devenir un musicien électro, j'ai plutôt utilisé des outils électroniques afin d'exprimer mes idées musicales. Je fais donc les deux. En plus d'être DJ, je peux jouer un maximum d'instruments: percussions, basse, piano, etc. Je peux réunir dix personnes sur scène, sections de cordes et vents, et je peux écrire des arrangements.

«J'aime aussi travailler avec des ensembles de plusieurs musiciens à qui j'écris les partitions. Les arrangements des cordes ou les vents sont de mon cru, alors que les instruments comme la guitare ou les claviers reçoivent des consignes moins strictes. De toute façon, chacun peut y aller de sa propre interprétation. Mes musiciens sont principalement basés en Angleterre. Jusqu'à l'été dernier, nous avons beaucoup joué sur scène la musique de Black Sands, mon plus récent album.»

Simon Green est de ces trentenaires s'appliquant à franchir la barrière du temps, au-delà du style qui l'a fait connaître une décennie plus tôt. Et au-delà de ces tendances et sous-tendances qui nous traversent les oreilles à la vitesse du son.

Des racines et des ailes

«Je proviens de cette école de DJ inspirés par le groove jazz, le funk ou la soul. C'était patent dans la région de Brighton. C'est là que ça s'est d'abord passé il y a 20 ans. Je trouve bien d'encore référer à cette époque, mais je ne tiens pas à m'y ancrer. Aujourd'hui, je fais des choses très différentes. Par exemple, je suis beaucoup moins jazz que je ne l'ai déjà été. Je sais où je suis, je ne me laisse pas influencer absolument par une nouvelle tendance, mais...

«Sans renier d'où je viens, je reste attentif à la nouveauté. Par exemple, je m'intéresse actuellement aux labels anglais Hotflush, Numbers ou Pictures Music. J'y pige ce que je veux bien y piger. Je ne veux pas non plus être de ces artistes frustrés par l'émergence des jeunes générations. Si une nouvelle tendance fait boule de neige, quelque chose justifie cette émergence.»

Ni âgisme ni jeunisme ne sont à la source de ses motivations artistiques, force est de déduire. Bonobo puise dans le bassin d'outils disponibles et réfère simultanément à différentes époques. Installé à Brooklyn comme le sont tant d'artistes issus du monde entier, Bonobo vit tout de même un décalage important quant au réseau culturel dans lequel il doit évoluer sur ce continent.

«À New York, on commence à réaliser l'ampleur de l'impact des musiques électroniques ou néo-électroniques. Imaginez le reste des États-Unis! Je sais néanmoins que cette différence de perception est beaucoup moins prononcée au Canada, particulièrement à Montréal ou à Toronto. Depuis longtemps à ce titre, le Canada est au même niveau que celui de l'Europe. Pourquoi vivre alors à Brooklyn? Parce que ces dernières années, j'ai travaillé de plus en plus en Amérique du Nord. Je ne vivrai peut-être pas très longtemps à New York, mais je trouve très inspirant d'évoluer dans de nouveaux environnements. D'ailleurs, j'ai souvent envisagé Montréal à ce titre.»

Montréal, la prochaine résidence prolongée? Il faudra d'abord consulter l'indice bonobo... hémien.

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Présenté par MEG Montréal, Bonobo se produit au Belmont dans la nuit de vendredi à samedi.