Le compositeur, dessinateur et turntablist montréalais Eric San, mieux connu sous son nom de scène Kid Koala, présente son plus ambitieux projet dès ce soir (et jusqu'à lundi) à la Biosphère. Mi-performance musicale, mi-installation visuelle, le Space Cadet Headphone Tour présenté dans le cadre d'Osheaga Arts accueillera 150 spectateurs à chacune des cinq représentations. Munis d'une paire d'écouteurs, ils se feront raconter l'histoire du petit astronaute dans des lieux transformés en galerie d'art.

Une simple question: dans sa déclaration de revenus, qu'écrit-il comme métier?

«Je garde ça simple: entertainer», dit-il en rigolant. On lui suggère la prochaine fois d'essayer conteur (storyteller), tant il semble que ce soit le seul fil directeur de sa carrière artistique atypique, partagée entre le dessin et la musique.

«Bonne idée, ça - on verra si ça passe! fait-il. Ça me rappelle la première fois que j'ai rempli les papiers du Festival de jazz pour la Guilde des musiciens. À la catégorie instruments, j'avais écrit: tables tournantes. Les administrateurs me les avaient renvoyés parce que ça n'entrait dans aucune catégorie. Ils m'ont dit: écrit donc que t'es choriste, ou pianiste, n'importe quoi d'autre...»

Kid Koala a passé sa vie professionnelle à mélanger les genres. Musicaux d'abord, évidemment, à l'aide de ses platines et d'une vaste collection de vinyles, guidé par une technique exemplaire et une oreille musicale infaillible. La musique a vite débordé sur le dessin, alors qu'il griffonnait ses propres pochettes de disques. Pour cette série de cinq performances dans l'île Sainte-Hélène, il faudra voir quelles nouvelles disciplines artistiques il réussira à rabouter ensemble.

En 2000, son disque Carpal Tunnel Syndrome contenait une première bédé. Trois ans plus tard, il a lancé (toujours chez Ninja Tune) la bédé-disque Nufonia Must Fall. À cet égard, Space Cadet, attendu en septembre, sera son second livre-disque. Sur scène, l'opération paraît aussi complexe que de faire décoller Columbia. C'est justement pendant de sérieux préparatifs qu'on attrape le Koala.

«On est huit en ce moment à travailler, dit-il, mais on sera un peu plus dans les prochains jours, avant la première, et sans doute davantage pour la tournée», qui doit déjà s'étirer jusqu'en 2013. Là, nous sommes à monter la galerie; il y a beaucoup d'équipement vintage avec lequel des spectateurs pourront s'amuser, mais qui voyage assez mal... J'aurai besoin de beaucoup de main-d'oeuvre.»

Eric San convient que ce Space Cadet Headphone Tour est radicalement différent de ce à quoi il nous a habitués. «Même que c'est une performance qui sied mieux aux galeries ou aux salles d'exposition qu'aux salles de concert normales, avoue-t-il. Puisque chaque spectateur a son propre casque d'écoute, l'expérience devient immersive. Mon but était de recréer le mieux possible l'atmosphère du livre», un récit, tout en image et sans mots, sur lequel il planche depuis 2004.

Les dessins du Space Cadet lui sont venus avant la musique, composée et enregistrée au cours des derniers mois, entre deux concerts de son groupe rock The Slew, projet réunissant son comparse de toujours DJ P-Love et la section rythmique du groupe hard rock australien Wolfmother. Koala termine justement l'enregistrement d'un nouvel album de The Slew, «avec des chanteurs invités, Mike Patton et Jon Spencer», dit-il. «Nos amis plus heavy! Pour Space Cadet, je suis revenu à mes racines: le piano classique, que j'ai étudié bien avant de toucher aux tables tournantes.»

La musique, comme une partie du récit d'ailleurs, est inspirée de son expérience de nouveau papa.

«Si je devais résumer Space Cadet, je dirais que c'est une histoire de famille, explique le Koala. La musique est en réalité très douce, tranquille... C'est vraiment le premier disque que je fais sans penser aux planchers de danse. Le défi, dans tout le concept, était ensuite de réussir à créer un spectacle qui respecte l'esprit, l'idée derrière le récit bédé.»

La surprise sera totale dès ce soir à 19h.

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