Le duo pop électronique ontarien Junior Boys revient en scène -et, littéralement, sur celle de la Sala Rossa ce soir, à l'affiche du festival Suoni per il Popolo- avec un quatrième album, It's All True, qui accentue le virage pop du groupe. «Même que je le vois comme un album r'n'b», avance Jeremy Greenspan, principal auteur, compositeur et interprète. Un disque r'n'b influencé par... la culture chinoise!

On retrouve Jeremy Greenspan dans son patelin de Hamilton, à la veille de reprendre la route pour défendre le nouveau matériel de It's All True: «Je voulais que ces chansons soient plus soul qu'avant, dit-il. Aussi, j'ai écouté pas mal de r'n'b dans les derniers temps. Des vieux trucs, du r'n'b aux limites du disco, des enregistrements des années 80, jusqu'au début des années 90.»

Ainsi, ce disque passe comme un courant d'air de renouveau pour Junior Boys, dont la carrière avait démarré de grandiose manière en 2004 avec Last Exit, album aux frontières de la pop indé et du house minimaliste. Au fil des parutions, le groupe s'est cependant trouvé plus à l'aise sur scène, influençant la manière de concevoir les enregistrements. «Lorsque je travaille sur une rythmique, je fais souvent le pari de me rapprocher de la pop contemporaine, explique Greenspan. Je vais mixer la voix très fort, en avant des instruments.»

Le précédent disque, Begone Dull Care (2009, sur Domino Records, comme tous les autres), un étriqué album concept inspiré de l'oeuvre de Malcom McLaren, ramenait Junior Boys dans une atmosphère statique, plus difficile à traduire en spectacle. «Pas de concept sur ce disque, prévient Greenspan. Pas sur le plan musical, en tout cas: je dirais plutôt qu'il y a un fil conducteur sur le plan des textes, sans doute les plus déprimants que j'ai écrits», des textes inspirés de la conjoncture ambiante, crise économique et autres plaies sociales.

Ce It's All True, mû par des rythmes plus dynamiques, devrait mieux passer la rampe que le précédent. Déroutant pour les fans des deux premiers albums, le nouveau passe allègrement d'une ambiance à l'autre -de la ballade pop aux épanchements house de Banana Ripple, la chanson qui clôt sur une bonne note It's All True, la plus «juniorboyesque» des titres du disque, également le premier single qui «rappelle davantage les nuances disco des premiers disques».

À la chinoise

Dernière influence sur cet album, plus difficile à cerner et, pourtant, capitale: la Chine. Explications: «Ma soeur habite Shanghai, elle enseigne dans une université là-bas. Elle y est depuis 10 ans, et je ne l'avais jamais visitée. Je me suis dit: c'est le temps d'y aller. J'y suis resté deux mois. Alors, j'ai tout emmené: ordinateur, équipements d'enregistrement, micros. L'expérience a été très intéressante.

«Ce que j'ai retenu de plus important durant ce séjour, c'est ce sentiment d'être submergé par la différence, par la grandeur de l'endroit et combien j'en savais peu sur le peuple chinois. C'est, j'imagine, le même sentiment que tous ceux qui ne sont pas chinois ressentent lorsqu'ils y habitent. On est face à une culture dont on connaît si peu de choses.»

L'impulsion nécessaire pour risquer un virage, pour amener Junior Boys vers d'autres quartiers de la musique populaire. Sortir de son confort et aller voir ailleurs.

Junior Boys, ce soir, à la Sala Rossa.