C'est l'un des nombreux plaisirs que s'offre Gregory Charles cette année. Chanter avec ses chums, Marc Déry et Jean-François Breau, le répertoire d'Elvis en quelque 200 chansons. Après avoir chanté l'intégrale des Beatles l'an dernier, ce sera au tour du King de revivre à Laval pendant cinq soirs, avec chaque fois un choeur d'une soixantaine de voix.

«C'était le seul capable d'accoter les Beatles», résume Gregory Charles pour expliquer ce tour de chant centré sur Elvis, au coeur de la programmation du 7e Mondial choral. Cet hommage à l'un des piliers du rock'n'roll n'est pas un hasard. Tôt ou tard, il lui aurait rendu hommage tant on sent chez lui l'admiration et l'inspiration de cet artiste «noir et blanc».

«Elvis représente le mariage de la musique noire et blanche. Gospel, rhythm'n'blues, country, rockabilly. À l'inverse de Nat King Cole, un artiste noir qui chantait à la manière des Blancs, Elvis a été l'un des premiers Blancs à chanter sur des rythmes noirs. Il a fait comme les artistes de jazz il y a 50 ans, il a proposé une deuxième lecture de chansons existantes en changeant les syncopes de place. En prenant des rythmes carrés et en les saccadant.»

Cinq soirs, donc, à raison d'une quarantaine de chansons par soir, pour interpréter, sans le jumpsuit, les plus grands succès comme les plus obscurs morceaux d'Elvis. Avec Marc Déry et Jean-François Breau, accompagnés d'un choeur d'environ 60 chanteurs du choeur de chambre du Collège vocal de Laval en appui. Un projet qui a nécessité un travail de plus de quatre mois.

«On l'oublie, mais Elvis a toujours chanté avec un choeur, rappelle Gregory Charles. Dans un sens, on n'a rien inventé. Sur les 200 chansons, il y en a 188 qui ont été faites par les Jordanaires, le choeur d'hommes qui l'accompagnait. Elvis pas de choeur, ce n'est pas Elvis. Quand il a fait son retour sur scène en 1968, à Las Vegas, tout habillé de cuir noir, il était là avec son choeur de 16 personnes.»

De A à Y

Les 200 chansons seront présentées par ordre alphabétique (de A Big Hunk O' Love à You're The Devil In Disguise), une façon de s'assurer qu'il y ait des succès dans tous les spectacles. Quant à la répartition des pièces, Gregory Charles explique qu'il y a eu négociation. «On avait chacun envie de chanter certaines pièces, alors on s'est fait une liste, et puis on s'est réparti les chansons. Il y en a quelques-unes qu'on chantera ensemble.»

Jean-François Breau était de l'aventure des Beatles l'an dernier. Lorsque Gregory Charles a pris contact avec lui, il n'a pas hésité une seconde. «Comme je suis un baryton, c'est plus naturel pour moi de chanter Elvis. C'est quand même un grand défi d'apprendre de 60 à 70 chansons. Mais je suis à l'aise dans ce répertoire.»

L'interprète de Don Juan avoue être attiré par le côté «chanteur de charme» et «fleur bleue» d'Elvis. Il affectionne particulièrement la période country du King. «C'est sûr que ça me rejoint. Je viens du Nouveau-Brunswick où ma famille écoutait beaucoup cette musique. Always on My Mind est l'une de mes chansons préférées de tous les temps.»

Des chansons moins connues

«Des 200 chansons, je n'en connaissais qu'une quinzaine, précise le jeune chanteur. Ç'a donc été une belle occasion de découvrir ce répertoire classique.» Gregory Charles estime qu'une bonne centaine de chansons sont «très reconnaissables», mais qu'une soixantaine d'entre elles ne seront connues que par un cercle d'initiés et de fans.

Parlant de vrais fans, le troisième larron, Marc Déry, n'attendait que ça pour sauter dans l'arène. «Je crois que la première fois que j'ai écouté de la musique, c'était Elvis. Ma mère collectionnait ses albums. Elle était folle de lui. J'ai vraiment grandi en l'écoutant. Ç'a toujours été pour moi comme un vieil oncle. Plus tard, bien sûr, j'ai pris conscience de l'influence qu'il a eue sur la musique.»

C'est pourtant son premier projet en rapport avec le King... «J'ai fait quelques reprises, mais rien de plus. Chanter Elvis est souvent caricatural. Je me gardais une petite gêne. Finalement, c'est comme un plaisir coupable. La proposition de Gregory était vraiment intéressante, avec le choeur, et je sais que je vais triper!»

La période qu'il affectionne le plus? «Sa période rock'n'roll et rockabilly des années 50. Des pièces comme Don't Be Cruel ou Love Me Tender, j'adore ces chansons.»

Pas de pastiche

Gregory Charles nous prévient: il n'y aura pas de personnification d'Elvis. Ni lunettes, ni cheveux gommés, ni cape avec rubis et diamants, même si les fans sont invités à se déguiser pour l'occasion le soir du 30 juin. «C'est sûr qu'Elvis avait un côté Entertainer Amazing, dit-il. Quand on chante Suspicious Minds, on donne un show, mais on ne veut pas faire de pastiche.»

Marc Déry admet qu'il est facile de tomber dans le piège de l'imitation. Avec déhanchements en prime. «C'est sûr que notre premier réflexe est de chanter comme lui. Mais l'idée, c'est aussi de se l'approprier. De respecter sa rythmique, qui l'a rendu célèbre, son style, mais avec notre timbre naturel, notre façon à nous.»

«Il avait un côté quasi messianique», croit Gregory Charles, qui dirigera ces spectacles-hommages de son piano, avec plusieurs autres musiciens.

«Avec son charisme lié à sa beauté et à son talent, il a vraiment rassemblé les gens. À peu près toutes ses chansons sont empruntées à d'autres: Dean Martin, Ray Charles, etc. C'est comme le Christ dans l'histoire humaine! Tout son message est emprunté à l'Ancien Testament, mais livré à la sauce «Aimez-vous les uns les autres». Elvis, lui, a repris des chansons, leur a donné du swing et les a rendues populaires.»

Elvis, de A à Z, à l'Espace Montmorency de Laval. À 19h, les 25, 26 et 30 juin, ainsi que les 2 et 3 juillet.

Info: www.mondialchoral.org