Formé à Los Angeles en 2004, Warpaint fait dans l'art rock et se décline au féminin: Emily Kokal (chant et guitares), Theresa Wayman (chant et guitares), Jenny Lee Linberg (chant et basse), Stella Mogzawa (batterie et claviers). Rock à têtes chercheuses et mains autodidactes.

John Frusciante, des Red Hot Chili Peppers, a collaboré au mix d'un premier maxi de Warpaint, paru en 2009 - Exquisite Corpse. Le quartette californien s'est fait d'abord remarquer sur scène en tournant avec le jeune groupe anglais The XX, notamment au dernier Pop Montréal. Également l'automne dernier, The Fool fut lancé sous étiquette Rough Trade, récoltant de très bonnes critiques.

Chapelets de guitares atmosphériques, voix ferventes et aériennes, fréquences électro, intérêt pour les mesures composées, allégeance rock, évocations post-punk. Le chant s'y décline souvent à deux ou même trois voix simultanées. Les guitares s'expriment de même façon, c'est-à-dire par motifs superposés plutôt que par l'habituelle combinaison solo-guitare rythmique. Ainsi, le langage de Warpaint préconise l'entrelacement de lignes exprimées individuellement et qui finissent par tisser une fibre singulière.

Emily Kakal au bout du fil. Derrière l'interviewée, on perçoit clairement des bruits de répétition. Puisque nous sommes au chantier, parlons construction. «Nous branchons nos instruments, nous créons à partir de lignes émises par chacune d'entre nous. Il en ressort quelque chose de très particulier. On doit s'assurer que le résultat complète celui des autres musiciennes. Ainsi, le tout est supérieur à la somme de ses parties. La méthode peut sembler désordonnée, mais elle donne de bons résultats.»

Jusqu'à nouvel ordre, la méthode Warpaint a fait ses preuves. Le caractère autodidacte de cet art rock le mènera peut-être rapidement à ses limites, cette façon de faire lui confère néanmoins une liberté d'expression. «Aucune d'entre nous n'a vraiment étudié la musique, convient Emily Kakal. Mais j'ai toujours été encouragée à jouer, à dessiner, à danser, à être dans un état créatif. C'est ainsi pour mes collègues. De surcroît, nous aimons toutes danser, le mouvement des corps est fondamental dans notre travail.»

La qualité des rapports humains, croit-elle en outre, est garante du succès de l'entreprise artistique. «Notre musique résulte d'une collaboration franche et conviviale. Chacune d'entre nous a ses considérations de style, mais chacune sait mettre à contribution ses goûts et son énergie au profit d'un son collectif. De surcroît, d'une réelle amitié. Nous sommes à la fois semblables et très différentes. J'ai grandi en Californie et en Oregon, Jenny est originaire de Reno, Stella de Sydney (Australie), Theresa est mon amie d'enfance. Chacune d'entre nous a des influences musicales spécifiques. En ce qui me concerne, j'ai beaucoup écouté Björk, du trip-hop et de la musique de qualité que j'ai découverte dans la collection d'albums de ma mère - King Crimson, Yes, Grateful Dead, Joni Mitchell, etc.»

Lancé en octobre dernier, l'album The Fool a suscité des critiques majoritairement positives, ce qui a sûrement contribué à propulser Warpaint au-delà de la scène rock californienne.

«Notre label (Rough Trade) est à Londres, on peut comprendre que BBC et NME nous aient réservé un très bel accueil à la sortie de l'album. Aux États-Unis, les réactions ont été positives de manière générale, surtout dans les grandes villes: New York, L.A., Chicago... Cela étant, notre ascension est certes plus longue que celle de The XX. Mais nous sommes très heureuses de ce qui nous arrive.»

Enfin, Warpaint ne veut surtout pas être dépeint tel un girls band. «Nous n'avons jamais eu le projet conscient de faire un groupe composé exclusivement de filles. Warpaint est d'abord la combinaison d'êtres humains», affirme Emily Kakal.

Warpaint se produit demain, 20h30, à la Sala Rossa, précédé de PVT et Family Band.