Blues, R&B et soul. Voilà trois ingrédients que David Coverdale s'est appliqué à fondre dans le rock lourd tout au long de sa carrière, en faisant un terrain de jeu pour sa voix d'exception. Avec Forevermore, 11e album studio de Whitesnake à paraître mardi, le chanteur reste fidèle à sa formule de prédilection, qu'il agrémente, çà et là, d'une touche acoustique.

Lorsqu'il a remis Whitesnake sur les rails, en 2003, après un long hiatus, David Coverdale croyait qu'il se lançait simplement dans une série de concerts. Or, l'accueil qu'on lui a réservé a été tel qu'il s'est rapidement retrouvé en studio. D'abord pour pondre quatre titres originaux complétant l'album Live in the Shadow of the Blues (2006), puis pour Good to Be Bad (2008), qui s'est hissé en tête de plusieurs palmarès. Aujourd'hui, le vétéran récidive entouré de Doug Aldrich (guitares), de Reb Beach (guitares) ainsi que des nouveaux venus Michael Devin (basse) et Brian Tichy (batterie).

«À la fin de la dernière tournée, j'ai été approché par plusieurs compagnies de disques, mais j'étais plus ou moins enthousiaste, car j'avais d'autres plans, raconte Coverdale, depuis sa résidence, à Lake Tahoe. Le label Frontiers était cependant déterminé et refusait toute réponse négative. [...] Avant de prendre une décision, je suis allé voir Doug Aldrich à Los Angeles, et on a comparé nos idées. Le premier jour, les chansons One of These Days et Whipping Boy Blues sont nées; la journée suivante, c'était All Out of Luck. C'est alors que je me suis dit : «Wow! on a encore du solide matériel à partager."»

L'amour sous toutes ses coutures

S'il a une facture américaine - Coverdale a quitté l'Angleterre pour les États-Unis il y a plus de 20 ans -, Forevermore fait écho aux premiers disques du Serpent blanc parus entre 1978 et 1982, où blues et soul étaient omniprésents. Le chanteur y défend des pièces mélodiques, souvent autobiographi-ques, célébrant l'amour sur toutes ses coutures, tantôt sur un ton romantique, tantôt avec une approche macho.

«À une certaine époque, j'étais choqué de ne pas être capable d'écrire autre chose que des chansons d'amour. Puis, j'ai fait un pacte avec Dieu en disant : "Si c'est mon destin, alors je ne m'y opposerai pas, mais qu'on me laisse raconter ce que j'ai à raconter le mieux possible." [...] Même si je suis très politisé et que j'adore Barack Obama, je ne lui chanterais pas des chansons d'amour... J'a-dore la nature, je suis sensibilisé sur le plan environnemental, mais je ne chanterais pas non plus à propos des arbres, ce n'est pas ce qui me vient naturellement.»

En grande forme

Coverdale apparaît en pleine possession de ses moyens sur Forevermore : il brille dans les envolées nuancées comme dans les cris haut perchés. C'est d'ailleurs cette polyvalence, combinée à sa présence charismatique, qui a fait de lui l'un des leaders les plus respectés du rock, de ses jeunes années au sein de Deep Purple à celles dans Whitesnake, sans oublier son association avec Jimmy Page. Le rockeur de 59 ans sait toutefois qu'il est exigeant envers son corps et que la voix humaine est un instrument fragile - il a été contraint, au terme de la dernière tournée, d'annuler des dates lorsqu'une sorte d'ampoule a affecté ses cordes vocales. Aussi n'écarte-t-il pas l'idée que, d'ici quelques années, il pourrait se tourner vers un répertoire davantage acoustique, que Forevermore laisse présager avec la pièce-titre ou encore Fare Thee Well.

Cela dit, David Coverdale estime être en forme comme il ne l'a pas été depuis longtemps et il continuera de défendre des chansons exigeantes à la Still of the Night tant qu'il pourra les rendre à la perfection, ce qu'il compte faire au cours de la tournée qui l'amènera bientôt en Europe, aux États-Unis et, espère-t-il, au Québec.

«Pour moi, être capable de raconter des histoires dans un autre cadre qu'un show rock est quelque chose de très tentant. [...] Je pense à une formule comme le live au Ronnie Scott's de Jeff Beck, où chanter des pièces telles Love Is Blind et Wherever You May Go seraient à propos. Mais tant que j'aurai le corps et la voix pour être un chanteur de rock, laissez-moi être un chanteur de rock'n'roll!»