Pour son premier album en sept ans, Cake a pris son temps, soulagé de la fin de son contrat avec Columbia. Il en résulte Showroom for Compassion, un album comfort food fait à l'énergie solaire à 100%.

Cake s'est produit à Montréal en septembre dernier, mais Showroom of Compassion, son nouvel album - le premier en sept ans - ne sort que mardi. «L'album devait être prêt pour le spectacle, explique le chanteur John McCrea. Nous avons réservé la salle plus d'un an avant et nous pensions que tout serait fini.»

Cake n'a plus de maison de disques qui met de la pression et qui lui dit quoi faire. «Nous avons pris beaucoup de temps depuis le dernier album, car il fallait trouver un moyen de partir de chez Columbia. C'est un navire qui coule. À part si tu es Christina Aguilera ou Jay-Z, c'est un mauvais système.»

Pour mettre fin à son contrat avec Columbia, Cake a sorti en 2004 un album composé essentiellement de reprises et de b-sides. Mais depuis, le groupe de la Californie est revenu avec sa propre étiquette comme à ses débuts, Upbeat Record. «Nous avons constaté à quel point c'était du travail de devenir indépendant, indique John McCrea pour expliquer le délai de la sortie de Showroom of Compassion. Nous sommes des musiciens, pas des hommes d'affaires.»

Mais pour Cake, le plus important était de devenir maître de ses décisions. Il a enregistré ses nouvelles chansons, à son rythme, dans son propre studio, à Sacramento. En tout et partout, la production de son sixième album a pris près de trois ans, alors que McCrea travaillait à l'écriture des nouvelles chansons depuis des années déjà. «L'album a pris plus de temps car le processus a été très participatif et démocratique... La démocratie, c'est lent», blague-t-il.

Le studio de Cake fonctionne entièrement avec de l'électricité provenant de panneaux solaires. «Tout l'album a été fait avec 100% d'énergie solaire, de l'enregistrement au mixage», souligne John McCrea.

Comme bien des gens de la région de la baie de San Francisco, le chanteur qui vit à Oakland est vert jusqu'au bout des doigts. «La vie est courte. Il faut faire bouger les choses avant d'être vieux, fait valoir McCrea. Beaucoup de gens aux États-Unis ne croient même pas en la science. C'est frustrant.»

En studio, les membres de Cake ont laissé leurs nouvelles chansons «voler» d'elles-mêmes, avec des essais et erreurs. «Nous voulions garder ça lousse, ne pas se donner un cadre trop rigide, explique McCrea. La musique, c'est davantage au niveau du corps que du cerveau.»

Il y a une dimension exploratoire dans Showroom of Compassion - même une pièce instrumentale -, mais les fans de Cake retrouveront le son typique du groupe: la voix nonchalante de John McCrea, les trompettes de mariachis, les riffs accrocheurs, une touche lo-fi et une attitude ironico-satirique.

Il n'y a pas de succès instantané à la The Distance sur Showroom of Compassion. Cake nous sert du comfort food, mais il pousse tout de même un peu plus loin ses recettes, en parlant autant du financement des partis politiques que de grossesse à l'adolescence et d'un homme à moustache. «Musicalement, j'ai laissé aller des choses sur cet album que je ne laissais pas aller sur les autres, note John McCrea. J'ai mis de la réverbération sur la voix. Avant, j'aurais trouvé que cela faisait trop grandiose... Je privilégiais le lo-key, et le moins d'excès possible. Là, j'ai osé plus de texture.»

Généreux

Lors de notre entretien téléphonique, avant Noël, John McCrea était dans un hôtel de St.Louis, dans le Missouri. Au bout du fil, il a été aussi généreux que franc. «Je n'aime pas voyager... Je l'ai fait pendant 15 ans. C'est une expérience que les gens ne comprennent pas. Tu arrives dans une ville en fin d'après-midi, tu fais des entrevues, puis c'est l'heure du test de son, tu essaies de manger quelque chose, tu fais le spectacle et tu repars faire de la route pour 15 heures. Quand tu reviens à la maison après deux ans de tournée, des gens sont morts, des couples se sont mariés... Et toi, ta vie est gelée.»

Cette désillusion de la vie de tournée n'empêche pas McCrea et ses complices de faire des spectacles de près de trois heures, comme à l'Olympia en septembre dernier.

«J'adore faire des spectacles, précise John McCrea, aujourd'hui âgé de 45 ans. Quand nous nous sentons bien et qu'il y a une bonne foule, nous restons sur scène longtemps.»

Si le groupe n'a pas joué sa populaire reprise de I Will Survive à son passage à Montréal, elle n'est pas bannie de son répertoire pour autant. «C'est tout simplement que nous n'avons pas de set-list et car nous n'aimons pas faire nos spectacles comme des machines.»