Sir Pathétik ne laisse personne indifférent. Le rappeur, l'un des plus étonnants succès commerciaux québécois des dernières années, est conspué par les puristes de la scène rap. Mais qui a besoin des haters quand les fans de tous âges (surtout des ados) achètent ses disques par milliers et se ruent à ses spectacles? Après dix ans de métier, le Trifluvien lance 10ième round, un disque aussi pop et rock que rap auquel collaborent Marie-Chantal Toupin et d'ex-Star-académiciens.

Comment expliquer le succès de Sir Pathétik? Est-ce la franchise et la simplicité de ses textes qui touchent tant ses fans? Les rythmiques formulées sur la base de dénominateurs musicaux communs? La petite toune accrocheuse placée ça et là qui rappelle les succès des Kaïn, Noir Silence et autres La Chicane?

Même le principal intéressé n'ose pas ébaucher une réponse à l'énigme. «Si tu me connaissais, tu comprendrais, nous répond le verbomoteur Sir Pathétik. Y'a pas de recette magique. Je suis près du monde, de mon monde.» Et de raconter qu'après chaque concert, il retourne dans la salle pour serrer des mains, signer des autographes, bavarder avec les gens. «L'autre jour, y'a des jeunes d'une école secondaire qui voulaient faire un projet sur moi. Je les ai invités à luncher au restaurant à côté de chez moi. On a parlé longtemps, c'était super, les jeunes étaient contents.»

Rien ne semble forcé dans le geste et l'empathie de Sir Pathétik. Au téléphone, depuis son Trois-Rivières natal, il parle sans langue de bois... mais évite avec élégance les sujets plus sensibles: «C'est vrai que la question du gaz de schiste est dans l'actualité et préoccupe ma région. Ce que j'en pense? Je ne peux pas t'en parler, je ne suis pas assez informé sur le sujet.»

Oubliez ça, une chanson sur le gaz de schiste sur un disque du rappeur. Mais les chansons sur ses fans, sur les filles et le party, sur les petites misères du quotidien - qui furent à une autre époque les mêmes thèmes de prédilection de La Chicane et consorts -, il y en a autant que vous voulez. Vingt comme ça sur 10ième Round, le nouvel album que le rappeur lancera dans un gymnase de boxe la semaine prochaine.

«Quand j'ai commencé ma carrière, je me faisais remarquer en disant des conneries, je voulais provoquer. Les gens embarquaient.» Une blague, au départ. Une gang de gars partis dans l'Ouest canadien qui dormaient dans la van. «Il y avait deux bons guitaristes. Mais personne ne chantait, alors je m'y suis mis. Je chantais n'importe quoi. Les gars m'ont encouragé, je me suis appliqué.»

L'aspirant rappeur, un des quelques amateurs de hip-hop de sa ville - «Il y a 10 ans, j'étais un des premiers à porter des culottes larges», dit-il -, emprunte à un ami athlète parti faire carrière aux États-Unis la somme nécessaire pour acheter ses premières boîtes à rythmes. «On bricolait des démos, pis j'allais dans un vrai studio à Montréal pour finir ça comme du monde.»

Sir Pathétik signe un contrat avec le label High Life Music en 2005, pour lancer son deuxième album, Un gars d'même. Peu à peu, ça décolle. Ses colletinages avec des vedettes pop - Dany Bédar sur la composition Ta dernière chanson - l'amènent peu à peu à fréquenter les palmarès des radios commerciales. Le Sir fait du bruit, ce qui ne manque pas de déranger les puristes du rap, qui lui reprochent son flow peu subtil, à l'image de ses textes.

«Ces gens-là militent pour leur son, leur flow, leur authenticité. Moi, j'ai un horizon plus large, j'ai le goût de faire autre chose que de passer mon temps à définir ce qui est rap ou pas, ce que je fais, moi. Regarde: on peut-tu passer à autre chose? Juste tripper avec la musique dans nos oreilles?»

Droit au but, sans ambages, sans complexes. C'est un peu ça, le secret du succès de Sir Pathétik. «Les haters ne viennent pas à mon show et n'achètent pas mes albums. C'est correct. Viens à mes concerts, pour voir. J'ai fait toutes les villes. Je suis allé jusqu'à Saint-Lin et Fermont donner des concerts, c'était plein partout.»

«Je sais pas pourquoi ça marche, mais quand les gens me voient en show, ils ont du fun. Quand j'entre en studio, je feel ma chanson, je crois que les gens le reconnaissent.»

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SIR PATHÉTIK

10ième ROUND

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