Inénarrable showman de la chanson française, Jacques Higelin refait surface, quatre ans après avoir lancé l'album Amor Doloroso et une décennie après sa dernière escale montréalaise.

«Ça fait longtemps que je ne suis pas venu à Montréal, un peu plus d'une dizaine d'années... Je n'ai pas vu le temps passer, car je n'ai pas arrêté, quoi! J'ai plein d'amis chez vous, ça me manque... À tel point que j'ai pensé un moment que vous ne vous intéressiez plus à moi! Alors? Je vais y retourner, soit aux prochaines FrancoFolies de Montréal. On m'a proposé ça l'autre jour», lance l'artiste, visiblement en forme pour une longue conversation téléphonique.

 

Dans cette amorce montréalaise, il tient à indiquer ceci: «Dans Coup de foudre, il y a cette phrase: C'est pas que je t'aime, mais y a de ça. À Montréal, j'avais assisté à Cabaret Neiges Noires, mon amie Louise Lecavalier m'y avait invité, et j'avais retenu cette ligne: «C'est pas qu'on vous aime pas, mais y a de ça», répliquaient des acteurs au personnage d'une vieille dame. J'ai pensé reprendre cette idée, mais dans son contraire.»

Coup de foudre a été réalisé par Rodolphe Burger et Christophe Mahut, soit la même équipe de médecins accoucheurs qui avaient aidé maître Jacques à donner naissance à son album précédent. «Amor Doloroso, raconte l'interviewé, a été créé en 2006. Après quoi on a fait une tournée d'au moins deux ans. Puis, j'ai attaqué Coup de foudre jusqu'à la fin 2009. On a mis un an à choisir les titres, rencontrer des musiciens, chercher... On a terminé l'été dernier.»

Ainsi, Higelin a choisi la même équipe pour faire son Coup de foudre.

«Nous sommes retournés sur les mêmes lieux qu'Amor Doloroso, sur les hauteurs de Sainte-Marie-aux-Mines, en Alsace. Rodolphe y a transformé le grenier d'une maison de ferme en studio. Un endroit vraiment magnifique, qui ne ressemble pas du tout à un studio. Absolument magique. Je ne voulais pas aller ailleurs!»

Plus électrique

L'interviewé confie y avoir pressenti un nouveau départ artistique en créant Amor Doloroso: « Lorsque j'ai fait cet album en 2006, je n'avais pas enregistré depuis longtemps - Paradis païen, en 1998. Il y avait dans ce studio l'énergie qu'on déploie pour un premier disque. Celui-ci? Non, Coup de foudre n'est pas la suite du précédent. Sauf Rodolphe et Mahut, l'équipe est différente. Plus électrique, plus rock.»

Une vingtaine de morceaux avaient été mis en chantier pour ce Coup de foudre, 11 ont été finalisés, un autre, plus proche de l'esquisse, contient un solo du trompettiste de jazz Erik Truffaz. Et les textes, maître Jacques? Résistance au bout du fil.

«J'sais pas... Comme Gainsbourg, no comment sur les textes. Une fois que c'est écrit, je ne pense plus en arrière. C'est ce qui est venu, ce qui a été dit et ce qui a été chanté. L'inspiration, ça vient d'on ne sait où, ce n'est pas un truc que tu commandes. Il faut être disponible, se laisser conduire. L'inspiration ne peut être dirigée sinon elle s'enfuit, effrayée par l'idée que tu veuilles l'enfermer. Elle n'obéit à aucun critère.»

Higelin croit donc au concept du passeur, du médium atteint par l'inspiration. Ce qui n'exclut pas le travail: «Pour chaque texte, j'ai écrit beaucoup plus long. Puis je coupe, je coupe... je finis par trouver un accord avec la mélodie et la musique. Cette dernière précède souvent le texte: lorsque l'air de New Orleans m'est venu, par exemple, il n'y avait pas d'idée a priori. Je me suis inspiré des images que sécrétaient les sons.»

L'origine de la chanson-titre, elle, provient d'une image bien réelle: «Un jour, il y avait beaucoup d'orage. On savait qu'il était risqué d'enregistrer, qu'il fallait tout éteindre à cause de la foudre. Ça a été plus fort que nous et on a enregistré.»

«Paratonnerre de Brest!» aurait conclu le capitaine Haddock.

CHANSON

JACQUES HIGELIN

COUP DE FOUDRE

EMI