Regroupés au sein de Vampire Weekend, quatre joyeux ivy leaguers sont venus nous visiter à quelques reprises depuis leur formation en 2006. Cette série de performances généreuses les ont menés à conquérir un public important à Montréal. Mardi soir, le National était rempli à ras-bord; les fans étaient au rendez-vous pour y flairer quelques chansons inédites de Contra, l'album à venir au début de 2010.

L'opération ressemble étrangement à celle de Franz Ferdinand à La Tulipe, fin 2008: aperçu de l'album (en écoute différée sur des hyperliens hyper protégés), tournée des médias locaux, tournée de rodage, sortie de l'album, grande tournée. Ce procédé semble être celui des acteurs importants de l'indie, et nos diplômés de la chic université Columbia, de toute évidence des fils de bonne famille, n'y font pas exception.

 

«Je crois que nous restons indie. Vous savez, nous avions joué deux fois à Montréal avant de lancer notre premier album avec l'impact qu'on sait», soutient Rostam Batmanglij, claviériste (programmateur, bidouilleur, etc.) et principal réalisateur de Contra. D'allure calme, ce jeune homme souriant est sûr de ses moyens, n'hésite pas à glousser d'ironie avant de défendre l'une ou l'autre de ses opinions - toujours fondées, force est de l'admettre.

Rien de plus normal que d'exhaler la douce arrogance des nouveaux élus de la pop culture. Il faut dire que ça s'est très bien passé pour Rostam et ses collègues de Vampire Weekend: au sortir de la ouate et des études convenues dans l'une des plus prestigieuses universités américaines, les boys ont été très rapidement propulsés en orbite autour de la planète indie.

Lancé en janvier 2007 sur XL Recordings, le disque Vampire Weekend a grimpé jusqu'à la 17e position du fameux top 200 du magazine Billboard ainsi qu'en 15e position sur le plus important palmarès britannique, rapporte-t-on sur la page Wikipédia consacrée à Vampire Weekend. En mars 2008, le périodique Spin qualifiait à l'avance le quartette new-yorkais de «meilleur nouveau groupe de l'année». On ne s'étonne pas non plus que Vampire Weekend ait trouvé un manager à sa mesure: Ian Montone, qui s'occupe aussi de la carrière des White Stripes.

Chose certaine, cette mixture bien élevée de chansons indie et pop/rock, saucées dans les musiques sud-africaines ou congolaises, ces influences évidentes de Paul Simon (étant donné la voix similaire du chanteur, Ezra Koenig) et des Talking Heads, tout ça a fait boum sur la planète indie. Mettons que tout baigne pour les résidants de Brooklyn!

Le son de Contra

Un deuxième chapitre s'imposait. Le processus s'est amorcé en janvier dernier.

«Nous nous sommes d'abord retrouvés tous les quatre dans un local de répétition, raconte Rostam Batmanglij. Dans cette pièce, nous avons évalué nos nouvelles idées de chansons. Ç'a duré un bon mois. Après avoir enregistré la batterie et les rythmes de six nouvelles chansons, nous avons fait un séjour inspirant au studio du DJ et réalisateur Toy Selectah - alors que nous faisions une courte tournée au Mexique. Nous sommes rentrés chez nous avec l'intention de miser davantage sur le studio.»

Le son de Contra est effectivement farci de subtils procédés d'enregistrements et aussi d'usages circonspects de la lutherie numérique. Aux riffs de guitare à la congolaise, aux mélodies typiques de l'Afrique australe déjà exploités par Vampire Weekend se greffent des éléments antillais ou brésiliens (baile funk) avec un fort argument technoïde.

Nouvel accomplissement, quête d'un son différent.

«Un des principaux objectifs de Contra était de ne pas nous répéter. Nous espérons nous être affranchis de nos influences. J'ai le sentiment que ce nouvel album nous ressemble davantage», croit le batteur Chris Tomson.

«Entre les deux albums, renchérit Rostam Batmanglij, il y a un continuum. Enfin... on l'espère. Mais nous souhaitons aussi que le public puisse reconnaître clairement Contra comme notre deuxième album. Nous voulions que la batterie et les voix soient encore plus mises de l'avant. Nous y sommes arrivés en usant de procédés subtils.»

Et comment tout ça se transpose-t-il sur scène? «Chaque soir de cette première tournée intime, répond Chris Tomson, nous testons trois ou quatre chansons différentes. Nous avons le sentiment d'être à mi-chemin entre la tournée précédente et ce nouveau cycle qui commence.»