C'était le plus flamboyant, le plus cow-boy et le plus détonnant de nos nababs du disque. Il a, avec quelques autres pionniers, jeté les bases de l'industrie de la pop québécoise au début des années 60. Il a chanté. Joué du piano. Produit des albums. Des 45-tours. Tâté du pop, du rock, du disco et même du punk. Et il est mort il y a deux ans, sans crier gare, avec l'impression de ne jamais avoir été tout à fait compris.

Cette nouvelle compilation rendra-t-elle justice à Tony Roman? Souhaitons-le. Car pour une fois, on ne résume pas cet excentrique à l'éternelle Do Wah Diddy, le tube qui lui a trop longtemps collé aux baskets.

Évidemment, on insiste encore lourdement sur la période yéyé du chanteur. Difficile d'éviter les Do Wah Diddy, Sha La La et autres Hanky Panky qui ont fait sa réputation à l'émission Jeunesse d'aujourd'hui (1964-1965). La bonne nouvelle, c'est qu'on nous fait aussi connaître des chansons moins connues, comme l'étonnante Grosse Mado (succès mineur de 1970), la «jamesbrownesque» Crier, crier (1965) ou des chansons beaucoup plus personnelles, enregistrées au milieu des années 70, sur des textes signés Gilles Vigneault (Laura Rose) ou Marcel Sabourin (À cheval sur un billot).

Non négligeable: le dernier tiers du disque est consacré aux succès produits par Tony Roman, facette moins connue mais non moins importante de son parcours éclectique. Où l'on redécouvre des classiques populaires comme Je t'aime je te veux (Johnny Farago), C'est fou mais c'est tout (Les Baronets), Les lunettes (Patrick Zabé), Quand tu liras cette lettre (Stéphane) et surtout l'essentiel Québécois (La Révolution française).

Livret, photos et témoignages du principal intéressé en prime, voici un portrait somme toute généreux de cet artiste hors norme, même si ce n'est là - et de loin - que la pointe de l'iceberg. En ce qui nous concerne, c'est sous la surface que Tony Roman était le plus intéressant. Aujourd'hui recherchée, son oeuvre plus «underground» (Reels psychédéliques, Mme St-Onge, Plastic Poison, etc.) reste à redécouvrir...

Tony Roman

C'est fou mais c'est tout

*** 1/2

Musicor/Select