On a souvent reproché au festival de Woodstock d'avoir occulté les bouleversements politiques de la fin des années 60, à l'exception du flash de génie de Jimi Hendrix qui, devant la foule clairsemée qui était encore sur place le lundi matin, a fait écho à la guerre du Vietnam dans son interprétation de l'hymne national américain.

Dans le film, certains artistes sont tellement impressionnés par la magnitude de l'événement - qui ne l'aurait pas été? - qu'ils en perdent leurs repères et donnent presque dans l'ésotérisme. Country Joe McDonald n'était pas de ceux-là, lui dont la décapante I-Feel-Like-I'm-Fixin'-To-Die Rag disait à peu près ceci: pourquoi on se bat? On s'en fout, on s'en va au Vietnam où on va tous mourir, youppi! Au public qui ne chantait pas assez fort à son goût, McDonald a même dit qu'il ne méritait pas mieux que d'aller au Vietnam! Joan Baez, aussi, a été fidèle à elle-même. Avant de chanter l'hymne ouvrier Joe Hill, elle a parlé de son mari David Harris, emprisonné pour avoir refusé d'être conscrit.

 

Mais c'est le Star-Spangled Banner de Hendrix, joué à la fin du film, qui a marqué l'imaginaire. En faisant parler sa guitare, Hendrix ramenait les membres de la génération Woodstock sur terre en lui rappelant que pendant qu'ils célébraient l'amour et la paix, d'autres moins chanceux se faisaient tuer au Vietnam.

L'année suivante, au festival de l'Île de Wight, Hendrix a joué le God Save the Queen à la guitare, mais ce n'était guère plus qu'une recette, un truc malhabile.