L'Union des artistes (UDA) a volé la vedette, lors d'une assemblée publique du gouvernement fédéral, jeudi, en réclamant qu'une redevance existant pour les CD soit aussi appliquée sur les iPod et autres lecteurs numériques.

Le ministre du Patrimoine canadien, James Moore, était de passage à Montréal dans le cadre de ses consultations sur le droit d'auteur, qui ont pour but de moderniser la législation en la matière.

Les chanteurs Marie-Denise Pelletier et Richard Petit, respectivement présidente et membre du conseil d'administration de la société de gestion collective de l'UDA, Artisti, ont tour à tour plaidé pour que le régime de copie privée, en vertu duquel des sous sont prélevés sur la vente de cassettes et de CD vierges, soit étendu aux lecteurs numériques, clés USB et autres dispositifs de stockage ainsi qu'à tout support futur.

«Ce n'est pas une taxe, a insisté M. Petit. C'est une redevance. C'est un acquis que nous devons (conserver). Il ne faut pas mettre dans la tête des gens qu'on les retaxe!»

«Dans un iPod, il y a une soixantaine de licences qu'Apple doit payer à ceux qui ont fabriqué ce bidule, a souligné Mme Pelletier. Et elles ne sont sûrement pas données, ces licences-là. Mais pour la raison d'être de ces iPod, c'est-à-dire la musique, rien. On ne paie rien. Moi, j'ai un peu de difficulté à comprendre qu'un gouvernement donne la priorité au contenant plutôt qu'au contenu. Est-ce que notre travail est un léger détail sans importance?»

La directrice d'Artisti, Annie Morin, en a rajouté un peu plus tard en insistant sur l'importance pour les artistes de toucher les sommes qui leur sont dues.

«Il n'y a pas que deux ou trois stars qui reçoivent cet argent-là, a-t-elle indiqué. On parle de 97 000 ayants droit! Pour eux, c'est vraiment quelque chose de crucial, de vital.»

«Ce que les gens disent, c'est "merci, j'ai reçu mon chèque de copie privée, je vais pouvoir payer mes impôts, merci, je vais boucler ma fin de mois", et il y a même des gens qui nous ont dit "wow! qu'est-ce que j'aurais fait pendant l'année où j'étais en chimiothérapie si je n'avais pas eu ces redevances-là?"», a ajouté Mme Morin en faisant clairement référence à la maladie qui a frappé Richard Petit.

Vice-présidente et directrice générale de l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ), Solange Drouin a fait siens ces commentaires, tout en exhortant les défenseurs d'un accès libre à tous les contenus à faire la différence entre l'accès au savoir et l'accès au divertissement.

«Les oeuvres culturelles, ce sont des choses qui se transigent, a affirmé Mme Drouin. Les gens vivent de ça.»

Des dizaines d'opinions sur divers aspects du droit d'auteur ont été échangées.

Différents intervenants ont bien sûr argumenté sur la copie et l'échange de fichiers numériques, certains y voyant du vol et d'autres pas. Mais le débat n'a été qu'entamé.

«En copiant une chanson, je ne viole la vie privée de personne et je ne lui enlève rien, a par exemple fait valoir Jonathan Ben, qui parlait en son nom personnel. Elle a toujours sa chanson. Et maintenant je l'ai aussi.»

De la même façon, l'idée de forcer les fournisseurs d'accès Internet à tout révéler sur les activités de leurs clients a été à la fois défendue et dénoncée.

Plusieurs représentants du monde de l'éducation ont aussi demandé au ministre Moore de prévoir des exceptions pour leur secteur.

L'audience était retransmise sur le Web et des internautes y ont participé à distance.

«Pourquoi un créateur pourrait n'avoir à produire que pendant une petite partie de sa vie et en bénéficier jusqu'à sa mort, alors que les autres doivent travailler toute leur vie? Les droits d'auteur à vie n'ont pas de sens!», a notamment commenté un jeune internaute de Vancouver, ce qui en a fait sourire plus d'un.

Des tables rondes plus réduites ont aussi été tenues par le gouvernement Harper depuis une dizaine de jours à Vancouver, Calgary et Gatineau. D'autres sont prévues dans les prochaines semaines à Québec et Halifax. Une assemblée publique comme celle de Montréal aura lieu le 27 août à Toronto.