Elbow cumule les honneurs depuis la sortie de son album The Seldom Seen Kid. Tout un revirement de situation pour ce groupe qui a longtemps dû se contenter d'un succès d'estime et qu'on verra la semaine prochaine dans le cadre du festival Osheaga.

Il arrive que des prix importants soient attribués à des artistes parce que des jurys en ont eu une perception positivement exagérée. Serait-ce le cas d'Elbow, un groupe anglais bardé d'hommages, dont le Mercury Prize 2008? Déjà, avant que le groupe de Manchester ne débarque au festival Osheaga, rien ne nous empêche de reconnaître la facture exceptionnelle de son plus récent opus, The Seldom Seen Kid, l'un des grands enregistrements de chanson rock de ces dernières années dont nous aurons enfin la transcription en chair et en os.

 

«Oui, nous sommes venus quelques fois à Montréal», échappe poliment Craig Potter, claviériste du groupe et frère du guitariste Mark Potter. L'humilité et la courtoisie presque candide du musicien n'étonnent pas. Potter sait fort bien qu'Elbow n'a pas chez nous l'impact qu'il a dans son pays ou dans les cercles raffinés d'amateurs anglo-saxons. Il ne fait pas de chichi et s'adresse à La Presse comme s'il faisait partie d'une formation inconnue.

Le Mercury Prize, ça ne change pas le monde, sauf que...

«Depuis la réception du prix l'automne dernier, explique Craig Potter, nous en avons gagné plein d'autres - Brit Awards, etc. Nous avons plus de succès que nous n'en avons jamais eu auparavant. Notre compagnie de disques (Universal) a injecté des fonds supplémentaires à la promotion. Nous avons eu de nouvelles opportunités, comme par exemple jouer le contenu de The Seldom Seen Kid avec un grand orchestre de la BBC, télédiffusé à souhait au Royaume-Uni. Notre auditoire s'est considérablement élargi. Fantastique.»

Comme c'est le cas de la plupart des groupes qui durent, l'échelon atteint par Elbow résulte d'une longue histoire d'amitié et de persévérance. Le claviériste raconte:

«Mark, Pete, Richard et moi allions à la même école secondaire. J'ai joint le groupe lorsque Guy a fait de même. J'avais alors 15 ans, j'étais plus jeune que les autres. Nous avons fait beaucoup de versions à l'époque - Carlos Santana, Sly Stone, funk, rock, etc. Puis nous avons traversé une phase plus chanson: Leonard Cohen, Nick Drake, Neil Young... C'est alors que nous avons réalisé le talent exceptionnel de Guy en tant que parolier.»

Côté affaires, Elbow a longtemps dû se rabattre sur un succès plutôt confidentiel. «La promotion de notre avant-dernier album fut à peu près nulle, relate Craig Potter. Ce fut pour nous un épisode très frustrant, car nous avions mis beaucoup d'efforts dans l'album Leaders Of The Free World. Or, avec The Seldom Seen Kid, nous sommes très heureux du résultat. Encore une fois, nous avons superposé avec soin plusieurs couches sonores, nous avons fait l'expérience de plusieurs procédés singuliers pour les arrangements, la prise de son, l'ensemble de la réalisation.»

Mais comment, dans un contexte de festival, traduire sur scène un album aussi fin? The Seldom Seen Kid ne demeure-t-il pas un enregistrement tout simplement exceptionnel, impossible à transcender sur les planches? «Nous essayons ensuite de faire une transposition très vivante sur scène, sans vouloir reproduire exactement ce qui a été créé en studio. Nous avons une petite section de cordes qui voyage avec nous, nous mettons plus d'accent sur les choeurs. Je crois que nous donnons un bon spectacle.

«À l'instar de plusieurs groupes, nous essayons de créer un univers qui nous est propre. Et nous pouvons compter sur l'un des meilleurs paroliers au pays. Nous n'avons pas hésité à multiplier les expériences lorsque nous avons réalisé que nous pouvions écrire de bonnes chansons. Nous ne créons pas d'une seule manière, d'ailleurs; nous essayons de déterminer les besoins musicaux de chacune de nos chansons.»

Avant de raccrocher, Craig Potter laisse entendre qu'Elbow a de nouvelles chansons dans sa besace, et que la création d'un nouvel album est prévue pour l'automne prochain. Avant de plonger dans le processus, il reste encore quelques dates de tournée, dont des premières parties pour U2 en Europe. Et Osheaga.

Elbow se produira au parc Jean-Drapeau le samedi 1er août, à 17h30, dans le cadre du festival Osheaga.