Il y a 40 ans naissait Kool & The Gang, groupe caméléon qui a lancé sa carrière dans le jazz pour ensuite embrasser les courants r&b, funk (et funk psychédélique) et disco, avant de connaître une véritable renaissance dans les années 90 à la faveur d'un certain succès cinématographique nommé Pulp Fiction... Survol d'une carrière échevelée avec le membre fondateur et bassiste Robert «Kool» Bell.

Monsieur «Kool» porte bien son nom. On l'attrape à son domicile de Jersey City, dans l'État du New Jersey, en train de se faire cuire un oeuf, ou quelque chose du genre. Il fabrique quelque chose à la cuisine, en tout cas, et nous jase ça le téléphone à l'épaule, avec bonhomie et cet accent typique du New Jersey.

«J'avais un autre type juste avant toi qui m'interviewait, un gars de Jersey City justement, à propos du 40e anniversaire de Kool & The Gang, raconte Robert Bell. Lui ai dit: you gotta talk fast, parce qu'y'a un type de Montréal aussi qui veut m'interviewer. Ça s'emballe, là: le 3 juillet, pile, ce sera notre 40e anniversaire. Mais bon, en fait on a commencé cinq ans plus tôt, sous le nom des Jazziacs...»

Jersey City, en soi, n'est pas exactement une mégapole musicale. Robert Bell, son frère Ronald (sax ténor), et le guitariste Charles Smith, un ami d'enfance, fondent les Jazziacs dès 1964. Ils passent plus de temps dans les boîtes de jazz de la vraie cité, New York, avant de fonder Kool & The Gang. «Mais on a été aussi les Soul Town Band et Kool & The Flames avant de nous brancher sur ce nom. Bref, ça fait 40 ans, et on s'apprête à partir en grande tournée pour souligner l'événement. Un nouvel album devrait paraître l'année prochaine.»

Lui, fan fini de Ron Carter et James Jamerson (des Funk Brothers, du studio Motown), avec son regretté ami Charles, «qui admirait le son et le style de Wes Montgomery», mort en 2006, trouvent l'équilibre entre le jazz et le funk et signent leur premier contrat de disque en 1969, touchant déjà un vaste public avec une première galette, éponyme, de funk, de pop, avec un soupçon de jazz.

Or, c'est quelques années plus tard que le groupe offre sa meilleure musique, un type de funk costaud mais toujours fluide, farci de bons solos et d'efficaces riffs: Wild and Peaceful (1973) contient deux classiques du groupe, Hollywood Swinging et Jungle Boogie... que le grand public a redécouvert en 1994 grâce à la trame sonore du film de Quentin Tarantino, Pulp Fiction.

«Les années 70, on a beaucoup aimé, abonde Monsieur Kool. Bon, les années 80 aussi, ce fut amusant, mais les années 70, c'était une époque très créative. Je suis fier des albums qu'on a faits, ce sont des disques pour tripper, pour danser. Des disques qui touchaient au jazz, au soul, mais toujours avec ce côté ensoleillé. Nos chansons plus funk et disco, elles pouvaient paraître innocentes, mais il faut s'attarder aux arrangements, à ce qui se passe par dessus le rythme. C'est là que ça devenait captivant.»

Ensuite, l'histoire de Kool & The Gang devient plus difficile à suivre. Arrive un chanteur, J.T.Taylor, qui propulse le groupe dans les palmarès disco et pop (Robert Bell quittera le groupe, pour y revenir après le départ de Taylor); de cette époque, deux autres immenses succès, Get Down on It et surtout Celebration (réalisé par le musicien et arrangeur brésilien Deodato!). Ensuite, c'est la disette, mais grâce aux musiciens de la scène rap, Kool & The Gang n'est jamais tombé dans l'oubli.

«Au début de l'ère du sampling, ils faisaient ça sans demander aucune permission, sans payer de droits d'auteur, se rappelle le bassiste. Certains de ces gars-là étaient corrects, ils nous appelaient pour obtenir les droits, d'autre faisaient ça sans nous en parler. Aujourd'hui, les temps ont changé, on a pas mal plus de contrôle sur ça - comme je dis toujours, on s'est mis sur le «sample patrol»! En fin de compte, cette pratique nous a amené de nouveaux fans qui ont découvert notre musique.»

Une musique qui demeure synonyme de célébrations, même après 40 ans.

 

En un mot

Deux, en fait : Jungle Boogie, N'oubliez pas de mettre des souliers confortables.

Dernier disque

Still Kool, New Door Records, 2007

Écouter

Hollywood Swinging, de l'album Wild and Peaceful, 1974.